Nous som­mes la cli­ma­tis­a­ti­on! La­ca­ton Vas­sal en­fin pritz­ké­ri­sés

«Enfin!» résume ce que nous avons entendu et ce que nous avons pensé à l’annonce que le prix Pritzker 2021 était remporté par Anne Lacaton et Jean-Philippe Vassal. Depuis le début des années 1990, les architectes français ont développé plusieurs approches pour «faire plus avec moins», soit revenir à l’essence de l’art d’agencer l’espace et la lumière.

Publikationsdatum
12-04-2021

Avec ce prix, l’approche du duo français, encore relativement marginale, pourrait bien être imitée par les architectes du monde entier. Il faudra observer si c’est bien leur méthode qui sera poursuivie, ou seulement l’esthétique fruste qui caractérise leur production. « On a souvent livré ces dernières années une vision appauvrissante de leur travail », remarquait il y a dix ans déjà Jean-Louis Violeau1. Nombre de promoteurs pourraient ainsi, en se réclamant de la démarche des architectes, la détourner en leur faveur pour « gagner plus avec moins ».

Aussi, de grâce, n’imitez pas les recettes, imitez la méthode. L’économie, dans les projets de Lacaton Vassal, n’est jamais une finalité, c’est un outil de projet. Une variable pour obtenir un maximum d’espace – pour les habitants sur les plateaux, mais aussi pour le végétal dans la pleine terre laissée libre.

Un autre ressort de cette stratégie est lié au confort thermique et à la gestion du climat, dont l’impact économique est décisif. « C’est là-dessus qu’aujourd’hui les budgets dérapent : ce n’est pas sur la structure ou sur l’enveloppe, mais c’est sur la question des fluides, de l’éclairage, de la ventilation. »2 Le confort intérieur ne repose plus que sur des calculs, regrettent les architectes, qui prennent en compte les cinq pires journées d’hiver et d’été. « Celles-ci définissent l’architecture, conduisent à surisoler, à surdimensionner les installations et à couper la relation entre dedans et dehors. »3 C’est pour cette raison qu’ils proposent de rendre l’habitant acteur de son confort thermique, de contrôler l’isolation et la climatisation de son appartement. De Bordeaux à Dakar, en passant par Genève et sa tour Opale, si les recettes se ressemblent, la stratégie s’adapte à chaque cas, en modulant l’épaisseur des façades pour l’adapter aux vents, à l’ensoleillement, aux microclimats changeants.

C’est à cette méthode de pensée que va le Pritzker : à une critique d’un déterminisme technologique qui, en normalisant le confort, finit par déresponsabiliser et déconnecter les usagers de leur habitat extérieur, de leur rapport culturel aux climats.

Notes

  1. AMC, 213/2012
  2. D’A 286/2020-2021, p. 31
  3. Dossier Lacaton Vassal extrait de archicréé 364/2014, p. 5

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