Qui est l’ar­chi­tec­te des via­ducs de Chil­lon?

Editorial paru dans Tracés n°19/2014

Data di pubblicazione
01-10-2014
Revision
10-11-2015
Jacques Perret
Ingénieur en génie civil EPFL, Dr ès sc. EPFL et correspondant pour TRACÉS.

Depuis plus de 40 ans, les viaducs de Chillon constituent un hommage «vivant» à l’ingénierie suisse. En plus de leur élégant dessin et des vues incomparables qu’ils offrent aux automobilistes sur l’Arc lémanique, ils sont aussi emblématiques du changement de sensibilité survenu en à peine un demi-siècle, tant il est évident que, de nos jours, ils ne pourraient jamais être construits. Nul doute que les défenseurs du paysage s’opposeraient à la réalisation de ce qu’ils dénonceraient comme une affreuse offense à la beauté du site, pour recourir à l’arme absolue de notre esthétique de la dissimulation: le creusement de galeries.

Se pencher sur les travaux d’entretien qui sont menés actuellement sur les viaducs autoroutiers impose de revisiter l’ensemble de leur histoire, afin de redécouvrir la diversité des performances techniques qui jalonnent leur existence. De leur construction à la fin des années 1960, par encorbellement et avec un recours intensif à la préfabrication in situ, aux présents travaux de renforcement avec du BFUP, en passant par la mise en place de précontrainte additionnelle à la fin du siècle dernier, il est certain que les ingénieurs qui ont eu la chance de contribuer à l’édification ou au maintien de ces ouvrages s’en sont donné à cœur joie. D’autant plus qu’ils ont eu le privilège de le faire sur un ouvrage et dans un cadre véritablement exceptionnels.

Alors que pour la première fois cette année, les ouvrages d’art ont été invités à la Distinction Romande d’Architecture (DRA), nul doute que ce tronçon de l’autoroute A9 mériterait de figurer dans un hypothétique best of rétrospectif. Prendre les viaducs de Chillon comme lauréat potentiel de la DRA pose indirectement la question de savoir quels seraient les mandataires qui seraient cités pour ces ouvrages. Une question qui semble d’actualité au moment où les résultats du concours 2014 viennent d’être publiés.

Si nous tenons à saluer le fait d’avoir élargi la DRA aux ouvrages d’art, nous ne pouvons nous empêcher de nous demander pourquoi cette nouveauté n’a pas été mieux mise en exergue lors de la présentation des résultats, notamment en soulignant et en faisant découvrir au grand public le rôle essentiel des ingénieurs qui ont piloté les deux ponts figurant au palmarès1. C’eût été là une occasion de promouvoir une véritable forme de collaboration entre les deux corps de métier. Et qui eût évité que, volontairement ou non, les qualités indéniables de ces deux ponts soient en premier lieu attribuées à l’intervention des architectes2.

 

Notes

1. Le viaduc sur l’A9 (lauréat) et le Pont noir (nominé), tous deux construits sur la H144, voir Tracés no 19/2012
2. Comme c’est par exemple le cas dans l’article de présentation du viaduc sur l’A9 dans 24 Heures le 19 septembre dernier.

Etichette
Magazine

Articoli correlati