Spa­ra­drap puis­san­ce 9

Editorial du numéro TRACÉS 22/2019

Data di pubblicazione
20-11-2019

Le 10 octobre dernier, à l’occasion de la Journée des infrastructures 2019, le Département fédéral de l'environnement, des transports, de l'énergie et de la communication (DETEC) présentait au public les résultats d’une étude1 visant à chiffrer, pour l’horizon 2100, le surcoût engendré par le réchauffement climatique sur nos infrastructures (transports, énergie, approvisionnement en eau, industrie et tourisme). Compilant d’autres études économiques, basées elles-mêmes sur des scénarios climatiques différents, elle aboutit à un chiffre bien rond: «un milliard de francs par année». Soit 0.15% du PIB de la Suisse, un peu moins de 120 francs par habitant. Circulez –en train de préférence– il n’y a (presque) rien à voir…

Si, de par sa nature, une telle étude et ses résultats sont difficiles à critiquer, la lecture de son résumé laisse perplexe: le réchauffement climatique n’a pas que des conséquences négatives. Des exemples? Ses auteurs y indiquent qu’il pourrait permettre de réduire la facture des dégâts dus au froid sur les routes et les rails et d’augmenter l’attractivité touristique estivale de la Suisse. Des contre-exemples? L’actualité récente en fournit à foison: rails déformés par la canicule de juin 2019, début d’un désamour de la part des touristes moyen-orientaux effrayés par la médiatisation des vagues de chaleur touchant l’Europe ou encore mise à l’arrêt d’un téléphérique déstabilisé par la fonte du pergélisol, etc.

Mais l’aspect inquiétant de cette étude tient avant tout à sa mentalité «sparadrap»: un bobo? Un bletse! En saucissonnant le thème du réchauffement climatique et en analysant les problématiques propres à chaque rondelle, on arrive à un chiffre aussi rond que simpliste: un milliard.

Un montant que la Suisse aurait même le luxe de s’offrir: l’exercice financier 2018 de la Confédération s’est soldé, selon le Département fédéral des finances, sur un excédent de trois milliards (pour un peu moins de 75 milliards de recettes) et les prévisions 2019 tablent sur un montant à peine inférieur.

Mais ne vaudrait-il pas mieux s’attaquer réellement aux racines du problème plutôt que d’appliquer des sparadraps à neuf zéros l’an? En se cantonnant aux seules infrastructures, ce ne sont pas les chantiers coûteux qui manquent: mobilité, ville intelligente, indépendance et transition énergétiques ou démantèlement des centrales nucléaires, pour n’en citer que quelques-uns…

 

Note

 

1. Christian Jaag et Nina Schnyder, Bedeutung des Klimawandels für die Infrastrukturen in der Schweiz, Berne, DETEC, 2019

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