Une com­mis­sion d’ar­chi­tec­ture et d’ur­ba­nisme à Lau­sanne

Editorial du numéro 18/2019

Date de publication
12-09-2019

Le 2 septembre dernier, le syndic de la Ville de Lausanne Grégoire Junod a officiellement annoncé la création, en 2020, d’une commission d’architecture et d’urbanisme.1 L’annonce, accueillie avec soulagement, pour­rait bien inspirer d’autres communes vau­doises. En effet, dans le canton, on est à la traîne. À Zurich, le Baukollegium a été institué en 1896. Cinq architectes aident le conseil communal à établir une vision urbanistique cohérente et à se prononcer sur des projets emblématiques, tandis qu’une autre commission se penche sur les questions liées au patrimoine. À Genève, deux commissions (cantonales), celle d’architecture et celle d’urbanisme, émettent depuis 1961 des préavis, tandis que la commission des monuments, de la nature et des sites a été instituée en 1920, déjà. Celle-ci est probablement la plus puissante – et la plus honnie – des commissions extraparlementaires. Erica Deuber Ziegler écrivait dans un petit historique de la commission, «comme le disait si bien un élu de la rive gauche dans son langage fleuri, ‹elle nous emmerde›».

Si la Municipalité de Lausanne a mis tant de temps à prendre cette décision, c’est probablement par crainte des «emmerdements». La composition réduite de la commission projetée le reflète. Le collège, réduit à cinq membres, devra traiter des questions d’urbanisme, d’architecture et de patrimoine. La représentation des architectes y sera limitée et celle des architectes paysagistes est encore ouverte. On se méfie des concepteurs – pourtant les plus indiqués pour discuter de qualité architecturale. La faute au snobisme affiché d’architectes qui ne s’intéressent pas au bien commun. Mais le projet trahit également une certaine ignorance de leurs compétences – généralement réduits à des questions de goût.

Or ce travail n’est pas celui du « bon goût », c’est celui de la synthèse. Comme l’explique Astrid Staufer, quand les architectes entrent dans un tel dispositif, ils doivent changer d’habit : ils n’ont pas à s’occuper d’esthétique ; ils deviennent des « spécialistes de la ville ». Leur mission est de délivrer une expertise professionnelle, sur la base de critères objectifs (cohérence des projets, précision typologique, qualité des espaces, articulation privé/public, volumétrie, etc.).

Une telle commission permettra de mener un débat de fond sur l’identité de la ville, par-delà les couleurs politiques. Pour les architectes, c’est l’occasion d’offrir une véritable expertise, et la chance, peut-être, de développer une nouvelle interaction, vertueuse, avec les pouvoirs publics et les usagers.

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