Une éco­le en plein air pour le 21e siè­cle

L’école Wallrüti à Winterthour de Schneider Studer Primas est l’une des plus grandes du canton de Zurich avec ses 24 classes de second cycle. Les architectes y déploient un concept d’espace qui pousse à l’extrême l’exploitation des surfaces.

Publikationsdatum
23-05-2023

Parmi toutes les propositions innovantes de bâtiments scolaires de ces dernières années, ce projet est sans doute le plus audacieux: il s’inspire de l’école de plein air développée au siècle dernier – et questionne de fait certaines habitudes dans la construction scolaire contemporaine. Lors du concours organisé en 2016, le choix du projet «Grosser Bär» de Schneider Studer Primas en avait surpris plus d’un, et par la suite provoqué quelques hochements de tête désapprobateurs pendant le développement du projet.

Située dans un quartier de maisons individuelles, ponctué de grands immeubles d’habitation et de quelques commerces à la périphérie de Winterthour, l’école Wallrüti, avec ses 28 salles pour 24 classes, est l’une des plus grandes du canton. Pourtant, elle n’en a pas l’air: les coursives extérieures qui l’entourent, en forme de nuages, dissimulent le cube compact de trois étages de manière si ludique que l’école s’apparente plutôt aux prairies et aux forêts environnantes qu’à la ville.

L’air frais pour tous, en tout temps

Il y a cent ans, les réformateurs de la pédagogie pensaient que l’air frais favorisait l’apprentissage comme la santé. Aujourd’hui, dans la nouvelle école de Wallrüti, les coursives offrent beaucoup d’espaces pour bouger, à l’extérieur. Les cheminements à l’air libre ne sont pas une nouveauté à Wallrüti: avant le projet de Schneider Studer Primas, le site était occupé par une école réalisée dans les années 1970 par Irion Architekten et qui offrait déjà des espaces extérieurs végétalisés entre les pavillons, regroupés en un petit village scolaire autour de différentes places. Là aussi, tout le monde devait sortir à la pause. Bien que dignes d’être protégés, ces pavillons se sont avérés difficilement restaurables en raison d’une corrosion trop profonde de l’acier Corten des façades. C’est pourquoi la décision a été prise il y a une dizaine d’années de construire un nouveau bâtiment qui, après des retards dus à la pandémie et à la planification, a été inauguré en août 2022.

Le projet de Schneider Studer Primas n’offre pas une cour d’école, mais plutôt des cheminements tournés vers l’extérieur, qui ne servent pas seulement d’accès aux salles de classe, mais forment aussi une cour de récréation, un espace de rencontre et même une scène – une chance pour celles et ceux qui veulent être vus. Les coursives offrent aux élèves beaucoup d’espace pour bouger. Une rampe et cinq escaliers en spirale relient les trois niveaux les soirs, les week-ends et pendant les vacances, tout comme pendant les heures de cours. «Les élèves viennent de toutes les directions, il y a des entrées de tous les côtés, note Jens Studer pour expliquer l’intégration voulue dans le quartier. Nous avons toujours considéré les coursives comme des espaces publics.»

De nouveaux espaces extérieurs pour le quartier

Les coursives qui entourent le bâtiment n’invitent pas que les élèves. En dehors des heures d’école, certaines activités provoquent des plaintes des riverains, parfois reprises dans les médias locaux : trop de lumière à cause des détecteurs de mouvement, trop de bruit, trop de déchets après les visites nocturnes… La directrice de l’école Maya Steffen, elle, n’est pas dérangée par les hôtes, seulement par les traces qu’ils laissent: «Nous considérons que l’utilisation par les habitants du quartier est plutôt positive. Mais ce serait quand même plus simple si nous pouvions reprendre possession des lieux après qu’ils aient été nettoyés.»

Pendant la journée, les coursives et les nombreux espaces verts qui les entourent appartiennent aux élèves, quand ils tournent autour de la grande école, en empruntant balcons, escaliers et rampes incurvées. Les coursives jouent le rôle des couloirs dans un bâtiment scolaire normal: desservir l’ensemble. Dans la partie chauffée, seuls 81 m2 de surface de circulation servent de zones d’accès entre le hall d’entrée, le secrétariat de l’école, les locaux pour les enseignants, les salles d’eau, les locaux de nettoyage et les locaux techniques. Tous les autres trajets se font à l’air libre sur les coursives qui entourent le bâtiment. Avant un cours, lors du passage vers une salle de travaux manuels ou de sciences naturelles, pendant la récréation, le temps et les saisons font partie du quotidien.

Économiser l’énergie grâce à l’efficacité des surfaces

À l’intérieur, les salles de classe sont alignées les unes à côté des autres et peuvent être reliées entre elles par des portes de communication à double battant. Ces liaisons intérieures permettent de composer des clusters pour l’enseignement interclasses. Lorsque toutes les portes sont ouvertes, l’enfilade des salles de classe se révèle dans les deux sens, de façade à façade.

Le volume de construction chauffé, sans aucun couloir, est extrêmement compact, tandis qu’à l’extérieur, les pergolas en béton se balancent autour du corps de verre: le nouveau bâtiment de l’école Wallrüti, avec ses 4000 m² de surface utile principale et ses 300 m² de surfaces utiles annexes, fait face à un peu plus de 2500 m² de coursives. Les minces piliers en acier des coursives évasées et les troncs des arbres existants et nouvellement plantés entourent le bâtiment. À l’intérieur, des piliers en béton massif de 55 cm de diamètre et des poutres supportent les charges. Sans aucun autre mur, ils assurent l’ensemble de la statique et du contreventement ainsi qu’une flexibilité d’utilisation maximale pour l’avenir.

Le standard énergétique du nouveau bâtiment scolaire de Wallrüti est bien supérieur à ce qu’exige la loi sur la construction. L’impulsion ne vient pourtant pas d’une volonté de sobriété, mais du programme d’économie rigoureux de la Ville de Winterthour. Né d’une nécessité (économique), le bâtiment scolaire fait preuve, face à l’avalanche de prescriptions actuelles, d’une grande audace expérimentale, avec des conséquences sur la performance énergétique.

Les excavations ont été également une source d’économies: il n’y a pas de sous-sol. Surtout, la disposition spatiale inhabituelle a des conséquences sur la vie sociale de l’école: la structure ouverte et la circulation périphérique, avec son invitation à se déplacer, est à la fois un cadeau et un défi pour les utilisateur·rices.

Nuage, forêt et poumon

Le bâtiment thématise aussi la prairie et la forêt dans l’espace urbain en se donnant à voir comme un poumon végétal. Difficile de déterminer s’il faut le décrire comme une forme libre, organique, ou cubique. L’interaction avec l’environnement est certainement liée aux courbes nuageuses, organiques, des coursives, mais aussi à la végétation sauvage qui se développe devant les façades du bâtiment, vitré du sol au plafond. Dans l’esprit d’une école en plein air du 21e siècle, les salles de classe sont principalement ventilées naturellement: ouvrez les portes-fenêtres et faites entrer l’air frais!

Ce texte a été publié dans TEC21 06/2023 et traduit de l’allemand par Marc Frochaux.

École secondaire Wallrüti, Winterthour (ZH)

 

Maître de l’ouvrage
Ville de Winterthour, Département de l’éducation et du sport

 

Architecture
Schneider Studer Primas Architekten, Zurich

 

Direction des travaux       
BGS & Partner, Rapperswil

 

Ingénieur structure
Schnetzer Puskas Ingenieure, Zurich

 

Architecture du paysage
Kolb, Zurich

 

CVS
Waldhauser + Hermann, Münchenstein

 

Sanitaire       
Bünder Hydroplan, Hochdorf

 

Électrotechnique       
Hefti Hess Martignoni, Zurich

 

Physique du bâtiment
Durable, Zurich

 

Signalétique
Sarah Infanger, Zurich

 

Coûts CFC 1-9
28 mio CHF

 

Coût du bâtiment par m3 CFC2 (volume)
1109.– CHF

 

Coût du bâtiment par m2 CFC 2 (surfaces utiles principales)
5030.– CHF

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