Acier et pro­tec­tion pa­ra­si­smi­que

L’acier reste un matériau performant, tant dans les structures porteuses que dans les composants secondaires. Pour autant que sa mise en œuvre ne reproduise pas les erreurs du passé.

Data di pubblicazione
12-09-2019
Pierino Lestuzzi
Dr Ing. EPF, est maître d’enseignement et de recherches au Laboratoire d’informatique et mécanique appliquées à la ­construction de l’EPFL
Pierre Colomer
Ing. civil Master / SIA, est coordinateur Antenne romande du Centre Suisse de la construction métallique.

Des tremblements de terre violents dé­vastent régulièrement des régions entières et peuvent en paralyser les infrastructures pendant de nombreuses années. Des catastrophes récentes, comme celles survenues en Haïti, au Népal, au Japon, en Indonésie et en Italie l’ont montré de manière impressionnante. En comparaison internationale, la Suisse est un pays modérément soumis au danger sismique. Toutefois, des tremblements de terre peuvent s’y produire à tout moment sans avertissement.

Si la protection des structures porteuses contre les effets des séismes est évidemment essentielle, celle des composants secondaires doit également être prise en compte. À quoi bon faire en sorte qu’une caserne de pompiers résiste, si ses portes se bloquent ou si le faux-plafond s’effondre sur ses occupants ? La téléphonie, l’approvisionnement en eau et en électricité ainsi que les voies de communication jouent en effet un rôle prépondérant pour les secours.

Les constructions en acier ont de grands avantages pour répondre aux exigences de protection parasismique. Dans le cas de halles en acier, la structure est tellement légère que les forces sismiques restent négligeables par rapport à celles du vent. Les bâtiments à plusieurs étages et les structures spéciales peuvent aussi bénéficier des bonnes propriétés de l’acier : il est léger, résistant et ductile, c’est-à-dire qu’il se déforme avant de rompre.

Erreurs de mise en œuvre

L’opinion qui a longtemps prévalu est que les constructions en acier sont a priori si ductiles que des règles constructives spécifiques améliorant le comportement sismique étaient superflues. Pourtant, les mauvaises expériences lors des violents séismes à Northridge (Californie, 1994) et à Kobe (Japon, 1995) ont remis ce dogme en question et suscité de nouveaux développements.

Après chaque séisme important, le même constat se répète : des erreurs récurrentes sont à l’origine de la majorité des dégâts et des effondrements de constructions, comme l’insuffisance de la stabilisation latérale, l’étage souple et la fixation des éléments secondaires.

Pour résister aux sollicitations sismiques, de caractère horizontal et cyclique, il est primordial de stabiliser latéralement la structure à l’aide de voiles (ou refends), de cadres ou de contreventements.

L’étage souple a lieu lorsque le premier niveau d’un bâtiment est libéré d’éléments structuraux encombrants pour en optimiser l’espace. Les refends y sont, par exemple, interrompus et remplacés par des poteaux. Cette configuration implique un comportement sismique défavorable car l’immeuble s’affaisse alors sur son rez-de-chaussée. Le même problème peut avoir lieu dans un étage supérieur, en cas de changement brusque de dimension des éléments porteurs.

Les dégâts sismiques con­cernent également les éléments secondaires, non porteurs. Ces dégâts représentent la majorité des pertes financières dans le cas d’événements modérés, et leur défaillance peut mettre des vies en péril, même si la structure reste intacte (chute de pans de façade, obturation de sorties de secours, etc.).

Principes de base de la conception parasismique

Prendre en compte les aspects parasismiques dès les premiers stades de la conception d’un bâtiment permet d’assurer un comportement favorable sans surcoût notable. Voici les principes guidant une bonne conception parasismique :

  • privilégier des formes en plan compactes, symétriques et régulières, éviter les parties saillantes, les angles rentrants et introduire des joints parasismiques en cas de formes asymétriques ;
  • favoriser des formes en élévation régulières et sans discontinuités brusques, s’assurer que les éléments de stabilisation horizontale soient continus de la toiture jusqu’aux fondations ;
  • assurer la résistance et rigidité vis-à-vis de la torsion, en disposant les éléments de stabilisation horizontale de manière symétrique et près de la périphérie ;
  • fixer les éléments de façade non seulement verticalement, mais aussi horizontalement afin de pouvoir encaisser les déformations dues aux séismes.

Exemple de la tour Bel-Air à Lausanne

Bâtiment lausannois emblématique des années 1930, la tour Bel-Air est le premier gratte-ciel du pays avec ses 16 étages. La sécurité sismique a dû être examinée lors de sa rénovation complète en 2016 (voir Tracés n° 17/2015).

La structure porteuse consiste en une charpente métallique remplie de panneaux en maçonnerie de briques. En négligeant cette dernière, on pourrait conclure à l’absence de problèmes : structure très souple, grandes fréquences propres. Cette hypothèse est toutefois irréaliste et trop favorable.

Si prendre en compte la maçonnerie dans un modèle numérique n’est pas chose aisée, il est toutefois possible de mesurer in situ les vibrations causées par le vent et le trafic pour en déduire les premières fréquences propres. La période fondamentale ainsi mesurée sur la tour Bel-Air est quatre fois plus petite que celle d’un modèle avec l’ossature seule, multipliant d’autant les efforts sismiques à considérer. Les résultats des mesures ont permis d’étalonner le modèle en introduisant des barres diagonales pour simuler la rigidité des remplissages.

La sécurité sismique a ainsi pu être prouvée malgré la nette augmentation des efforts à prendre en compte en considérant la participation des remplissages en maçonnerie à la résistance latérale. Par ailleurs, l’examen des détails a montré que les panneaux sont convenablement retenus latéralement.

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