La mu­ta­ti­on de la ville

Un programme éclectique pour comprendre la ville qui change

Publikationsdatum
22-02-2018
Revision
26-02-2018

La ville évolue, se métamorphose… Trop vite pour certains, trop lentement pour d’autres. La ville mute, questionne, elle est l’objet de toutes les attentions et personne ne semble fort heureusement capable de la contrôler.

Le programme d’ÉCRANS URBAINS s’attache à proposer une diversité des points de vues sur ce phénomène pluriel que l’on appelle la ville. Tantôt sombre et critique, parfois plus heureuse et plus optimiste, la sélection de films nous fait traverser et mieux comprendre ces enjeux, ces parcours de vie et ces grandes métamorphoses à l’œuvre. Le cinéma s’approprie le réel pour mieux le transcender, pour mieux nous émouvoir et nous éclairer.

Les spectateurs pourront plonger au cœur des mutations de la Chine contemporaine à travers quelques œuvres de ses meilleurs représentants et observateurs: les univers intimes de Tsai Ming Liang (Chiens errants) ou de Pengfei Song (Beijing Stories), la puissance et la rigueur documentaire de Wang Bing filmant ces anonymes victimes de la révolution urbaine (Argent amer), ou bien encore Disorder, ovni documentaire fait d’images amateurs et professionnelles qui nous précipitent dans le chaos urbain. Chaos et mutations urbaines que le réalisateur français Hendrick Dusollier observe lui aussi depuis plusieurs années avec sensibilité, humilité et originalité formelle. Une séance spéciale à la cinémathèque lui sera consacrée. L’occasion de découvrir en sa présence son dernier film en exclusivité Derniers jours à Shibati mais également ses deux premiers courts métrages d’animation qui œuvrent eux aussi au renouvellement des formes et des approches. Puis encore l’Asie, avec le bijou formel Diamond Island du réalisateur Davy Chou. A mi-chemin entre Michael Mann et Hou Hsiao-Hsien, le cinéaste franco-cambodgien suit le destin d’une jeunesse en quête de repères dans un Phnom Penh en pleine métamorphose. Un beau film sur un pays pris entre tradition et modernité.

La série Living Architectures sera l’occasion tout au long de la semaine de découvrir et de nous plonger dans les entrailles de l’architecture contemporaine. Démarche originale, drôle et poétique qui consiste à questionner l’architecture à travers le regard de celles et ceux qui flirtent avec elle au quotidien. Le portrait d’une maison conçue par Rem Koolhaas vue par la femme de ménage suffit à résumer la démarche de ses auteurs où l’architecture prend vie, s’agite et se révèle aux yeux des spectateurs. Rem Koolhaas sera mis à l’honneur à la cinémathèque cette fois-ci filmé par son fils dans une démarche à la fois sensible, personnelle et éclairante (Rem).

écrans Urbains se fera aussi l’écho de la crise immobilière qui frappe l’Espagne (Bricks), de la privatisation croissante des villes (City for Sale), du devenir urbain de quelques grandes mégapoles (Las Vegas Meditation, Hashti Tehran, My Father’s Wing, Espaces intercalaires), ou encore du destin tragique d’ouvriers syriens à travers une puissante réflexion sur l’exil et sur les notions de construction/destruction (Taste of Cement).

Les choix de programmation se sont également portés sur deux cinéastes suisses. Le Zurichois Thomas Hämmerli viendra présenter son dernier film qui, partant de sa propre expérience, nous plonge dans une aventure à la fois concrète, ludique, sensorielle et chaotique de la gentrification des villes.

Le réalisateur lausannois Samuel Chalard sera aussi présent pour présenter son film Favela Olímpica, qui aborde avec beaucoup d’humanité le triste revers de la médaille olympique, celle des derniers Jeux de Rio et de ses favelas. Triste revers également que ces anciens sites olympiques (ceux d’Athènes cette fois-ci) laissés à l’abandon et investis par quelques adolescents perdus, à l’image de ces territoires en friche et d’une société en crise. A travers cette fiction (Park), la cinéaste grecque Sofia Exarchou filme et questionne l’espace, à la fois comme terrain de jeu et enjeu premier d’un cinéma atmosphérique et réflexif.

Pour clore cette édition, ÉCRANS URBAINS proposera au théâtre de Vidy Lausanne une séance plus événementielle et spectaculaire avec un cinémix. L’occasion de vivre une performance visuelle et sonore envoûtante où les nappes électro de l’artiste Jean-Yves Leloup croiseront les images hypnotisantes du film culte Koyaanisqatsi.

Aldo Bearzatto et Hervé Bougon, programmateurs d’écrans urbains