Un her­ba­rium ar­chi­tec­turé

Dans la salle de conférence du jardin botanique de St-Gall, les plantes ont le premier rôle. Doté d’un minimum d’installations techniques, l’édifice en bois conçu par l’architecte Tom Munz accueillera encore des orchidées sur son toit.

Date de publication
30-11-2022

La salle de conférence est ceinte à l’arrière et sur les côtés de serres en acier et en verre. À l’avant, il y a une place avec de grands camélias et des azalées mises en pot pour l’été et derrière, un peu plus haut, l’impressionnante ancienne orangerie qui confère au lieu un air méridional. Entre les hautes fenêtres de la salle, on est plongé dans une profusion de végétaux. Comme l’explique l’architecte «nous avons beaucoup discuté de ces vitrages avec le maître de l’ouvrage. Nous voulions mettre en scène la végétation et projeter un jeu de lumières et d’ombres sur la place et dans le bâtiment». Depuis l’extérieur, les silhouettes des plantes se multiplient comme dans un kaléidoscope. Une observation plus précise permet de dire si l’on voit vraiment des spécimens placés projetés devant la fenêtre d’en face ou les pans d’ombre des espèces grimpantes devant la façade sur le rideau ou, encore, le reflet sur la vitre d’un arbre poussant de l’autre côté du bâtiment. Ombres, reflets ou plantes, tout cela bouge avec la brise, se déplace avec la course du soleil ou s’assombrit à l’arrivée d’un nuage. Un filtre vert intégré au verre renforce l’effet et, bien sûr, la végétation joue aussi un rôle de climatiseur.

Des rideaux servant aussi de séparations permettent d’obscurcir la salle. Le foyer est délimité par un aménagement -encastré vert – en panneaux multicouches décapés offrant des rangements pour les microscopes et les livres, ainsi qu’un évier et des prises électriques. À l’opposé, l’issue de secours est munie d’une fenêtre pour l’aération transversale. Entre deux exposés, on peut vite renouveler l’air en ouvrant les deux portes dans l’axe est-ouest du vent -dominant de la haute vallée saint-galloise.

Lattes sacrificielles et savon norvégien

Le bois de la salle de conférence répond au métal des serres. La structure s’appuie sur le type classique et extensible en série de l’orangerie traditionnelle. On a opté pour une ossature empilable, transportable sans véhicule spécial, d’autant que l’activité du lieu devait être maintenue durant le chantier. Les éléments ont rapidement été -assemblés sur place et les panneaux de toiture encastrés.

Tom Munz rappelle que «la Ville tenait a priori à des contreventements en acier, mais nous avons réaffirmé que le bois ferait l’affaire. Tout est donc en pin non-traité issu de la région». Seules les deux portes ont un revêtement protecteur conforme à la norme SIA et un laquage selon l’éco-standard saint-gallois. Quant à la protection UV du bois à l’intérieur, c’est un savonnage d’après une recette norvégienne apportée par l’entreprise Blumer-Lehmann. Plus exposées et soumises à un grisonnement accéléré, les arêtes externes des façades sont doublées de lattes sacrificielles – comme dans le bâti agricole traditionnel. Une fois usées, on les dévisse et on les remplace sans devoir changer toute la pièce – idem pour les planches brutes sous l’arête de toiture.

Orchidées sur caoutchouc naturel

Depuis le toit plat, les feuilles élancées des – orchidées projettent leurs ombres sur la place. Même si leurs spores sont quasi -omniprésentes, sans terreau maigre en – milieu urbain, ces spécimens rares peinent à trouver leur place. Les botanistes qui s’en occupent au jardin ont ainsi déterminé un dispositif de couverture en nattes drainantes reposant sur du caoutchouc naturel. Au départ, un simple débordement de l’eau de pluie était prévu, mais des essais ont montré qu’elle pourrait prendre le dessus, si bien que la variante finale ne laisse plus -dégouliner que quelques gouttes par les bords, tandis que le reste s’évacue par des conduites aux angles. L’eau va ainsi dans les plates-bandes entourant les fondations et remplace l’arrosage vespéral.

Hormis l’ajout de la façade végétalisée, tout est identique au projet de concours, – explique Tom Munz. En formulant leur proposition, les architectes avaient tu leurs doutes sur l’ampleur des frais d’exploitation et ne les avaient abordés que par la suite. Or, l’ancien directeur du jardin, Hanspeter Schuhmacher, s’est montré totalement emballé et les jardiniers ont eu le feu vert pour déterminer les plantations et leurs emplacements en fonction des points cardinaux.

Participants au projet

 

Maître de l’ouvrage: Service des bâtiments de la Ville de Saint-Gall

 

Architecture: Tom Munz Architekt, Saint-Gall

 

Ingénierie civile: Borgogno Eggenberger + Partner, Saint-Gall

 

Ossature en bois: Blumer-Lehmann, Gossau

 

Installation électrique: Elektro Akermann, Saint-Gall

 

Technique du bâtiment: Gübeli Energie Technik, Degersheim

 

Physique du bâtiment: Studer + Strauss, Saint-Gall

 

Protection feu: Meile + Hollenstein, Mühlrüti

 

Bâtiment

Surface: 110 m2

Volume: 542 m3

 

Bois et Construction Ossature

 épicéa (Suisse)

 

Dates et coûts

Projet et construction: 2017-2020

Bâtiment (CFC 2): 5500 CHF/m2

Cet article est paru dans le numéro spécial "La ville en bois - Édifices en bois pour la formation". Vous trouverez d'autres articles sur le thème du bois dans notre dossier numérique.

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