Avan­ta­ges du con­cours d'­ar­chi­tec­tu­re en pro­cé­du­re ou­ver­te

Les règlements en pratique

Faut-il opter pour des concours d’architecture en procédure ouverte ou sélective? Une mise en concurrence plus large, ainsi que le surplus d’idées originales et l’inclusion de la relève qu’elle offre, plaident dans la majorité des cas en faveur d’une procédure ouverte.

Publikationsdatum
07-02-2019
Revision
07-02-2019

Depuis 140 ans, les concours d’architecture et d’ingénierie organisés selon le règlement SIA 142 perpétuent une tradition dont la réputation s’étend au-delà des frontières suisses. L’émulation qu’ils entraînent favorise l’innovation, contribue à accroître les qualités architecturales et techniques d’un projet, ainsi que la fonctionnalité, l’économicité et la durabilité d’un ouvrage, sans oublier la valeur sociale qui découle de ces atouts. C’est pourquoi le concours est un instrument inégalé pour promouvoir une culture du bâti de haut niveau.

Différences entre procédures ouverte et sélective

Les concours organisés conformément au règlement SIA 142 peuvent se dérouler en procédure ouverte, sélective, ou sur invitation. Les maîtres de l’ouvrage privés ont toute latitude quant au choix de la procédure et sont en outre libres d’attribuer des mandats directs. En revanche, la Confédération, les cantons et les communes ou d’autres institutions de droit public sont tenus de mettre officiellement au concours les marchés d’étude et de construction dont la valeur dépasse un certain seuil et d’adjuger les mandats correspondants en respectant les dispositions légales applicables. Pour ce faire, ils peuvent opter pour une procédure ouverte ou sélective. En procédure ouverte, le mandant met officiellement son besoin au concours et tous les professionnels intéressés et habilités à participer peuvent soumettre une solution. En procédure sélective, l’annonce est également officielle, mais les concepteurs et conceptrices intéressés doivent commencer par faire offre de candidature. Après quoi, les organisateurs du concours mènent une procédure de qualification afin de désigner les professionnels dont les références de prestations et les capacités offrent les meilleures garanties pour répondre à la tâche décrite. Toutes choses égales par ailleurs, et comme le démontre l’expérience acquise par la SIA dans le cadre des programmes de concours qui lui sont soumis pour approbation, la préférence tend aujourd’hui clairement vers la présélection.

Procédure sur invitation déguisée?

Lors de procédures sélectives, le nombre de professionnels qui remplissent les critères de participation et de qualification déterminés dépasse souvent les attentes des responsables du concours. Les projets de référence soumis par les candidats doivent être comparés, puis évalués et jugés par le jury. Or, faute de documentation exhaustive – car le contenu des dossiers de candidature doit rester succinct – cela s’avère souvent difficile. Et comme la présélection prévue par la procédure ne se déroule pas de façon anonyme, un observateur extérieur peut avoir l’impression que les bureaux désignés par le jury le sont en fonction des personnes et non des ouvrages de référence présentés dans le dossier. Cela peut fonder le soupçon d’une procédure sur invitation déguisée, ce qui serait contraire à la loi sur les marchés publics et ferait planer la menace d’un recours.

La présélection ne garantit pas de trouver la meilleure solution

Grâce à la limitation du nombre de concurrents aux prestataires les plus aptes, beaucoup de mandants espèrent réduire leurs frais d’organisation et obtenir des propositions de meilleure qualité. L’expérience montre toutefois que la procédure sélective ne garantit ni l’un ni l’autre. Des pièces justificatives superflues sont souvent exigées, ce qui alourdit le travail nécessaire à l’examen préalable des dossiers. De plus, la qualité des projets proposés n’est pas nécessairement plus élevée, vu que même des bureaux réputés n’apporteront pas systématiquement la solution optimale à chaque besoin. Cela peut tenir au fait que ces bureaux reçoivent plusieurs invitations au même moment et se trouvent alors aux limites de leurs capacités. Ou, vu que les mêmes prestataires se voient à la longue retenus pour des tâches analogues, qu’une sorte de routine de projet s’installe, qui finit par inhiber l’innovation. Qui plus est, la présélection pousse malheureusement les professionnels à se spécialiser dans certains types de construction, précisément pour mieux répondre aux critères de qualification correspondants et accroître leurs chances de participation. Enfin, ladite participation s’avère totalement aléatoire pour de jeunes architectes encore sans grande expérience. Certes, un nombre limité de jeunes concepteurs et conceptrices sont en général admis à poser leur candidature, par exemple sur la base de dossiers de concours qui ne portent pas directement sur des tâches de même nature ou sur la foi de projets auxquels ils ont collaboré à titre de collaborateurs indépendants avec d’autres bureaux. Mais ce dernier cas de figure peut impliquer une difficulté à distinguer les prestations qu’ils ont effectivement fournies. 

La procédure ouverte, une «absurdité économique»?

En procédure ouverte, l’égalité des chances est réalisée, y compris pour des bureaux débutants. Ceux-ci peuvent ainsi accumuler de précieuses expériences et étoffer leurs parcours et capacités. Bien sûr, le nombre de participants est alors plus élevé que pour une présélection et l’exposition des projets nécessitera une organisation un peu plus importante, mais en contrepartie, le mandant obtiendra un très large éventail de propositions parmi lesquelles choisir la solution optimale. Dans l’économie de marché ouverte dont la Suisse se réclame, ce dernier argument devrait à lui seul affaiblir le préjugé très répandu selon lequel les concours ouverts représenteraient une absurdité économique. Enfin, l’ouverture permet aux architectes de se mesurer à leurs pairs dans un cercle de concurrents beaucoup plus vaste et d’affiner ainsi leur offre de prestations.

2 contre 1 pour la procédure ouverte

Le concours ouvert constitue en principe la procédure adaptée à une majorité de projets de construction. La procédure sélective peut se justifier pour des tâches particulières hautement spécialisées, telles que la conception d’une prison ou d’un hôpital. Les délais et les frais inhérents aux deux formes de procédure sont à peu près équivalents. Mais en dernière analyse, une plus forte concurrence, l’incitation à innover qui en résulte, ainsi que la libre participation de la relève plaident en faveur de la procédure ouverte.

Monika Jauch-Stolz, Présidente de la commission SIA 142/143 des concours et mandats d’étude parallèles

 

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