Mar­seille 2013 en 13 images

Ici est ailleurs

Eugène poursuit ses pérégrinations dans la Capitale européenne de la culture 2013

Date de publication
30-04-2013
Revision
23-10-2015

1. Je me tiens sur la terrasse du FRAC à Marseille. Le bâtiment à la façade en lamelles imaginé par Kengo Kuma a été inauguré il y a un mois. De là-haut, je contemple une ligne de tram inaugurée il y a cinq ans. Le tram file sous mes pieds et longe les immenses Docks dont le réaménagement en bureaux et boutiques est presque achevé. Au loin, la tour aux lignes fluides de Zaha Hadid semble surgir de la mer comme une dernière vague. Je me tiens sur la terrasse d’un nouveau musée d’où je contemple un nouveau quartier.
2. Au pied de la tour de Zaha Hadid, les courbes glissent au-dessus de ma tête. Gratte-ciel aux contraintes folles : 1172 poteaux tous différents pour l’ossature de la tour, coffrages sur mesure, un nouveau béton, 6300 panneaux asymétriques vitrés. Une sorte de Rolex Learning Center, mais fiché debout… 
3. Au Dock des Suds. Nouveau restaurant ouvert par Charlotte Bensoussan, une autodidacte qui invente des lieux avec son association Viens à Marseille. Le client choisit son repas parmi des centaines de bocaux artisanaux rangés dans une immense bibliothèque. Autre lieu étonnant : la nouvelle salle d’attente de la gare Saint-Charles. Un salon cosy british, des bouquins à échanger, un bar : tout pour passer un moment original en attendant son TGV.
4. Au cœur du quartier du Panier. Une place a été réaménagée en espace convivial, où fleurissent les tables colorées des bistrots. Sur le mur d’en face, des graffitis rageurs : « Capitale de l’exclusion 2013 », « touristes go home ».
5. Esplanade où se dresse le célèbre Musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée (MuCEM), dont la peau en résille métallique, imaginée par Rudy Ricciotti, a déjà été reproduite dans de nombreux magazines. Malheureusement, le cube de 15 000 mètres carrés n’est pas ouvert. « Revenez en juin ! » me lance un ouvrier. De toute façon, les objets qui seront exposés attendent depuis huit ans dans des dépôts. En effet, le MuCEM prend la place du Musée national des arts et traditions populaires (MNATP) à Paris, fermé en 2005. 
6. Encore une porte close : le bâtiment voisin avec son avancée en porte-à-faux de 40 m, baptisée Villa Méditerranée, n’est pas ouvert non plus. « Revenez en mai, me lance un autre ouvrier. Ou en juin. Enfin je sais plus. »
7. Nuit dans un cabanon de pêcheur, au bord de la mer. Une pièce unique aménagée au bord de la Méditerranée avec cuisine, lit en mezzanine et petit balcon. Le bruit de la mer, sans le bruit des voitures !
8. Au réveil, à l’horizon, surgit l’île d’If, avec son château. J’aimerais vous parler d’un célèbre locataire. Non pas le Comte de Monte-Christo, mais un rhinocéros. En 1516, le roi Emmanuel du Portugal voulut offrir au pape un animal inconnu jusqu’alors en Europe : un rhinocéros indien ! L’animal fut embarqué sur un navire qui fit escale sur l’île d’If. A l’époque, ce confetti rocheux était sauvage ; aucun château n’y avait été bâti. François Ier, en pèlerinage dans la région, accourut pour admirer l’étrange créature, croisement entre une licorne et un éléphant. On fit des esquisses. Puis le rhinocéros reprit la mer. Mais, suite à une tempête, il mourut noyé dans le golf de Gênes. Albrecht Dürer vit l’esquisse et dessina à son tour un rhinocéros. Ce dessin, l’un des plus célèbres de la Renaissance, témoigne de la rencontre du nord et du sud, il y a cinq siècles, à Marseille.
9. Je me dirige vers la Charité Nouvelle, magnifique hospice datant du 17e siècle, avec au centre de la cour, sa chapelle au toit ovoïde. En chemin, j’observe que les graffitis ont été effacés.
10. A la Charité Nouvelle, grande exposition de Joseph Koudelka. D’origine tchèque, Koudelka a passé ces 20 dernières années à photographier les principaux vestiges antiques autour de la Méditerranée. 19 pays traversés. Une démarche unique. Et classique en même temps : encore une fois, le nord rêve le sud. 
11. Question muséographie, la grande exposition au hangar J1 est à couper le souffle. Posé sur la mer, ce hangar abrite au premier étage la gare maritime des voyageurs en partance pour le Maghreb. Et tout le deuxième étage est dédié aux manifestations culturelles de 2013, dont l’exposition Méditerranées. Le visiteur voyage d’Alexandrie à Venise en passant par Byzance, avec comme fil rouge un migrant, véritable Ulysse des temps modernes. La scénographie n’utilise que des conteneurs maritimes. Rarement un thème et un lieu ne se seront aussi bien nourris l’un de l’autre.
12. Friche de la Belle de mai. Tout le monde connaît l’histoire : une friche industrielle abritant plus de 60 associations, avec une salle de théâtre et plusieurs espaces d’expositions. En chemin, je longe le Pôle Média de la Belle de Mai. Le bâtiment d’à côté. Ça n’a l’air de rien, mais à l’intérieur se cache un haut lieu de l’imaginaire français : le plateau de tournage du feuilleton Plus belle la vie. Depuis 2000 soirs, les téléspectateurs suivent le quotidien de quelques habitants du Mistral, un quartier fictif de Marseille (qui ressemble comme deux gouttes de pastis au Panier). 
13. Cité Radieuse fin d’après-midi. Un Rom joue de la trompette entre les pilotis. Quelques habitants ouvrent la fenêtre, écoutent un moment, puis jettent quelques pièces dans le gazon.

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