Le choix co­hé­rent du moindre mal

Date de publication
21-05-2014
Revision
19-08-2015
Jacques Perret
Ingénieur en génie civil EPFL, Dr ès sc. EPFL et correspondant pour TRACÉS.

Le résultat de la votation des Neuchâtelois concernant les éoliennes a le mérite d’être cohérent : gourmande en énergie et désireuse d’abandonner la voie nucléaire, notre société doit impérativement développer d’autres moyens de production. Si la seule énergie éolienne ne suffira bien sûr pas à compenser la production atomique, personne ne peut douter qu’à terme, les nuisances d’hélices géantes – démontables en tout temps – se révèleront bien moindres que celles bien plus tenaces des scories des centrales nucléaires. En matière d’énergie, les moyens de production disponibles semblent d’ailleurs suivre une règle assez simple : plus un mode est efficace, plus les inconvénients qui lui sont associés sont importants. Avec pour conséquence, qu’ayant à choisir entre divers maux, il est raisonnable de privilégier les moins nuisibles.
Reste dès lors à espérer que l’exemple neuchâtelois soit suivi par d’autres, pas uniquement dans le domaine éolien. Dans cette perspective, les ingénieurs sont d’ailleurs appelés à jouer un rôle qu’ils peinent encore à endosser, celui qui consiste à assister les non spécialistes – notamment les politiques – dans ce qui se résume souvent à la recherche de la « moins mauvaises des solutions ». En effet, leur contribution ne peut plus se limiter à la mise au point de solutions techniques et ils doivent aussi apprendre à expliquer les enjeux qui s’y rattachent, en ayant l’honnêteté d’évoquer à la fois les avantages et les inconvénients des options envisageables.
Dans le domaine de l’énergie, comme dans de nombreux autres domaines, c’est cependant au niveau de la réduction de la consommation que le plus grand travail reste à faire. Notion au coeur du fonctionnement de l’univers, l’énergie demeure néanmoins un concept abstrait qu’il est difficile de visualiser. Victime de son apparente abondance, de son omniprésence quotidienne et de la stratégie moderne qui consiste à dissimuler ses moyens de production, elle est aujourd’hui l’objet d’une surconsommation inconsciente et banalisée. A cet égard, en imposant une visualisation spectaculaire de la production d’énergie au grand public, il est possible d’imaginer que les éoliennes puissent jouer un rôle pédagogique aussi inattendu que salvateur en responsabilisant les consommateurs.
De grands combats idéalistes n’ont-ils pas déjà eu lieu aux pieds des moulins ?

Étiquettes

Sur ce sujet