Ho­no­raires: ap­pel à sur­veil­lance. Et à la pa­tience.

Éditorial TRACÉS 08-09/2025

Zurich s'impatiente: le Canton et la Ville sont las d'attendre la révision des honoraires et imposent des honoraires… réindexés depuis l'année 2018. Cet épisode traduit l'impatience générale face à un problème qui date de 2018. La Value App de la SIA est en test: vivement la révision des RPH.

Date de publication
10-09-2025

En matière d’architecture, ce qui vient de Zurich est en général plutôt bon à prendre. Mais pas cette fois: en début d’année, la Ville et le Canton ont décidé d’un arrangement sur les honoraires versés aux architectes, comme le raconte Judit Solt dans son enquête (p. 28). Lassées d’attendre la révision des règlements concernant les prestations et les honoraires (RPH), les deux entités publiques ont décidé de réindexer les honoraires en prenant comme référence l’année 2018. La raison? Les coûts des ouvrages ont augmenté de manière excessive comparés à l’augmentation générale des coûts et à la hausse des salaires dans les bureaux de planification. Pourquoi les honoraires des mandataires devraient-ils être liés, par exemple, au coût de l’acier, qui avait doublé, voire triplé pendant la pandémie, argumente-t-on sur les bords de la Limmat? 

Mais les coûts de la construction ne sont pas les seuls à avoir augmenté, ont répondu les professionnels. Il y a aussi tous les planificateurs qui ont bien dû faire avec les moyens du bord. La Ville et le Canton de Zurich ont augmenté les taux horaires − mais pas assez, selon la SIA et la FAS. Car peu avant 2018, un autre événement historique (qu’on a tendance à oublier ces derniers temps) s’est déroulé sur Terre: l’Accord de Paris sur le climat. Depuis lors, le métier n’a cessé de se complexifier avec l’introduction de normes et de labels. Mais aussi avec une injonction à l’innovation: faire plus avec moins. Dès lors, la hausse des prix de la construction semblait compenser, du moins en partie, l’augmentation de la complexité.

Aujourd’hui, on craint que la mesure zurichoise fasse tache d’huile, d’autant plus que ces deux administrations sont plutôt exemplaires en matière de culture de bâti. Aussi nous appelons à la vigilance, au cas où d’autres communes et cantons seraient inspirés par cette drôle d’idée de fixer les honoraires à leur gré. 

Mais cela ne règlera pas le vrai problème, que cette affaire révèle une fois de plus. Pour les deux administrations zurichoises, 2018 est aussi choisie car c’est la date du dernier cahier d’aide au calcul publié par la SIA, SIA 108-K. Souvenez-vous, cette année-là, la Commission de la concurrence (COMCO) obligeait la SIA à retirer son modèle de calcul (qui liait le temps de travail au coût de l’ouvrage). Depuis lors, la SIA a testé un premier modèle, qui n’a pas fonctionné. Puis lancé un second, en collaboration avec l’ETH Zurich: la «Value App» est désormais en test et la révision des RPH, prévue au printemps prochain, devrait finalement voir le jour… fin 2026. Tout cela prend du temps, beaucoup de temps.

En attendant, on continue d’employer un modèle de calcul d’honoraires désuet, lié au coût de l’ouvrage. La SIA le déplore: ce système pénalise l’innovation et l’intelligence conceptuelle: non seulement il n’incite pas à faire mieux avec moins, mais le modèle est peu adapté à la transformation, à la surélévation ou au réemploi, autant de tâches complexes qui visent précisément à diminuer le volume de matière à mettre en œuvre. Espérons que la révision sera effective avant que la société ait complètement oublié l’Accord de Paris.


 

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