Archives du bâti: du rôle des archives et de leur absence
Quinze ans après un premier dossier sur le rôle et la fonction des archives d’architecture, espazium.ch est parti à la rencontre d’institutions internationales captivées par cette mission. La mise en valeur des fonds d’archives de la maison d’édition espazium, étant l’un de nos objectifs pour l’année 2021.
À l’ère de la digitalisation et de la «googelisation» de masse, les archives d’architecture refont surface. Avec la création récente de deux nouvelles institutions –d’abord à Berne avec l’association Architektur Archive, puis à Genève avec l’inauguration de l’Architrave, rattachée à la HES-GE– le réseau de centres voués au catalogage de l’architecture et l’ingénierie s’amplifie et renforce le rôle de la Suisse en tant que référent mondial en la matière. Si ces nouveaux centres de la mémoire semblent avoir le vent en poupe, nous constatons que leur valorisation auprès d’un public plus large que celui des chercheurs n’est malheureusement pas à l’ordre du jour.
L’absence des archives et de leur diffusion au sein du débat très actuel de la culture du bâti n’est pas un phénomène nouveau. Il y a 15 ans, TRACÉS (2006/12) soulignait déjà le problème dans un numéro dont le titre ne laissait aucune ambiguïté quant au contenu: Les archives aux oubliettes? Pour qui sont conçus ces centres de recherche? Quelle est leur finalité ou leur influence dans la divulgation de la culture du bâti? Que proposent aujourd’hui ces institutions à l’ère des données intangibles et des belles images? Comme le constatait l’historien et professeur Pierre Frey pour clore sa leçon d’honneur à l’EPFL en 2015: «Maintenant que les phases de la mise en place et de la maîtrise de l’institution sont derrière vous, la véritable question sera de savoir avec qui construire un réseau de recherche qui soit capable d’interroger la ressource à la hauteur des réponses qu’elle peut procurer.» Il parlait, dans son cas, des Archives de la construction moderne (Acm) de l’EPFL et incitait ses successeurs à questionner sans pudeur les problématiques inhérentes à ces centres pour garantir la vivacité et l’expansion de l’institution.
Entre digitalisation de masse et vulgarisation des contenus
Pour amplifier ce questionnement et se réinterroger, 15 ans plus tard, sur l’utilité des archives, espazium.ch est parti à la découverte de ce qui se fait à l’étranger. De Los Angeles à Rotterdam en passant par Paris et Montréal, ce nouveau dossier digital examine les pratiques et savoir-faire d’une sélection d’institutions internationales reconnues.
Pour certaines d’entre elles, la globalisation est l’occasion de se lancer dans l’acquisition massive de fonds monographiques, quelles que soient leur origine ou leur histoire. Pour d’autres, il s’agit de s’éloigner de la connotation de «centre d’investigation», en vulgarisant leurs contenus afin de les rapprocher d’un public moins spécialisé. D’autres encore se présentent directement comme centres d’expérimentation ou musées publics. Peu importe leurs spécificités, ces centres poursuivent un objectif commun: s’adapter aux nouvelles habitudes de «consommation culturelle» et rendre plus accessibles les ressources documentaires qu’ils recèlent. La digitalisation étant l’une des réorientations possibles.
À travers une série d’entretiens illustrés, cette série d’articles tente de raviver le débat national, aussi bien dans le contexte académique que culturel. En interrogeant les directeurs de ces centres, nous souhaitons élargir le champ des possibles, présenter des stratégies diverses et participer à la pérennisation d’organismes voués à la mise en lumière de l’architecture et de l’ingénierie, qui, pour la plupart, comme à Berne et à Genève, peinent à trouver leur place dans l’engrenage intellectuel et pratique des disciplines qu’ils promeuvent.
espazium.ch : un outil de travail public
En parallèle à la conduite de ces entretiens, cette série d’articles nous a amenés à questionner notre rapport à nos propres archives. Car à notre manière, celle de la recherche journalistique, la digitalisation progressive des contenus produits dans les trois langues nationales par les différentes rédactions d’espazium – Les éditions pour la culture du bâti- nous a permis d’accumuler et construire une pensée propre à la culture du territoire helvétique et ses multiples variations.
Pour nous adapter à la transition digitale de la société et valoriser l’extraordinaire fonds d’archives en notre possession (lequel s’étend de 1874, avec la naissance de l’ancêtre de TEC21, à nos jours), nous avons décidé de lancer en 2021 l’énorme chantier de mise en ligne de nos archives. Déplacer la simple base de données ordinaires et fournir un véritable outil de travail est l’objectif principal que nous nous sommes fixé.
Avec ses sept institutions nationales et les revues spécialisées les plus anciennes d’Europe, la Suisse possède l’un des plus vastes réseaux d’archives d’architecture au monde. Leur survie, physique ou digitale, dépend grandement de leur adaptation aux bouleversements culturels de notre époque. Dans cette optique, espazium.ch veut se convertir progressivement en plateforme de ressources documentaires au service de tous les acteurs de la culture du bâti, tout en conférant une plus grande résonance aux documents d’archives dans le développement pratique et théorique de l’architecture et de l’ingénierie contemporaine.
> Article en anglais
«Archives of architecture: on the role of archives and their absence»
> Dossier: Archives du bâti
Série d'entretiens conduits par espazium.ch
# Het Nieuwe Instituut (HNI), Rotterdam (Pays-Bas) - Français / Anglais
# Getty Research Institute (GRI), Los Angeles (États-Unis) - Français / Anglais
# Deutsches Architekturmuseum (DAM), Francfort (Allemagne) - Français / Anglais
# Cité de l’architecture et du patrimoine (CAP), Paris (France) - Français / Anglais
# Centre Canadien d’Architecture (CCA), Montréal (Canada) - Français / Anglais
# Archives architectures Genève (Ex-Archives IAUG), Genève (GE) - Français / Anglais