Vilanova Artigas, toujours d’actualité
Éditorial du numéro d'octobre 2020 de la revue TRACÉS
L’armée et la religion sont les deux piliers de la politique de Jair Bolsonaro. Le président brésilien nostalgique de la dictature militaire (1964-1989) s’est appuyé sur l’église évangélique pour asseoir son pouvoir. Il ouvre aujourd’hui des écoles militaires dans tout le pays et vide les universités de ses étudiants, dont bon nombre choisissent aujourd’hui l’exil.
L’armée et la religion fournissent également les deux analogies explicatives de la faculté d’architecture et d’urbanisme de São Paulo (FAU USP), l’ouvrage le plus important de Vilanova Artigas et dont l’influence sera immense auprès des architectes de sa génération – et bien au-delà. D’après les mots de son concepteur, le bâtiment devait être un «temple sans fenêtres» (lire l’essai de Daniele Pisani). Il était aussi «une forteresse ouverte» (lire l’essai de Lara Borgonovi). Ces deux comparaisons, sous forme d’oxymores, nous indiquent le projet que poursuivait Artigas et les architectes paulistes de sa génération: créer des espaces qui rassemblent, ouverts à toutes et à tous – à l’inverse de la politique mise en œuvre par le régime actuel.
Ce dossier thématique a été conçu pour accompagner une exposition qui devait être montée au Forum d’architectures de Lausanne – la première à montrer en Europe les dessins originaux de Vilanova Artigas. Le publier aujourd’hui prend une autre signification. L’événement a été repoussé, d’abord en raison des mesures prises en Suisse pour lutter contre l’épidémie, puis de la gestion catastrophique de la situation au Brésil, forçant le centre d’archives de la FAU USP à rester fermé encore pour de longs mois.