Une ques­tion de taille

Editorial du 22/2016

Date de publication
09-11-2016
Revision
10-11-2016

Un récent article du New York Times rapporte cette anecdote à propos de celui qui est peut-être, à l’heure où vous lisez ces lignes, le nouveau président des Etats-Unis (à moins, comme nous l’espérons encore en cette veille d’élections, qu’il ne soit retombé dans les poubelles de l’histoire). 
Nous sommes en 1979. Le jeune Donald, qui n’a que 33 ans, a commandé aux architectes Der Scutt, Swanke, Hayden, Connell and Partners sa première Trump Tower, celle de New York. On lui présente la maquette au 1/32e du gratte-ciel dans son contexte. Quelque chose le chiffonne. «Ma tour paraît un peu petite». De fait, à quelques blocs de là, la tour General Motors est plus haute que la sienne de 41 pieds. Pour ce winner de la première heure qui entend faire une entrée fracassante dans le monde de l’immobilier (et dans le monde tout court) avec cette démonstration de puissance érectile, la réalité est dure à encaisser. S’adressant au maquettiste, il demande candidement: «Pourriez-vous rendre ma tour plus haute?». «Non?». « Peut-être pourriez-vous alors raccourcir celle de GM?». Et d’un trait de crayon, il dessine une marque sur le gratte-ciel qui a l’impudence de toiser sa tour d’une dizaine de mètres, à la hauteur qui lui paraît convenable. Il n’y a plus qu’à scier maintenant. Le maquettiste s’exécute et voilà la tour GM amputée de son tiers supérieur, et l’ordre des choses rétabli. 
«Formidable!». 
Plus tard, Trump, tout à son désir de grandeur, n’hésitera pas à s’arranger avec les chiffres. Le New York Times fait la liste de ses gratte-ciel new-yorkais pour lesquels il annonce un nombre d’étages plus élevé qu’il ne l’est en réalité. Sur le site de The Trump Organization, la Trump Tower gagne ainsi dix étages, la Trump World Tower 20. Péché d’orgueil ? Pour ne pas s’en laisser compter, Trump finira par racheter la tour de General Motors en 1998 (avant de la revendre).

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