SIA: Pro­tec­tion in­cen­die : lé­gis­la­tion 2015

L’entrée en vigueur au 1er janvier 2015 des prescriptions suisses de protection incendie de l’Association des établissements cantonaux d’assurance incendie (AEAI) a apporté son lot de modifications et a bousculé quelques certitudes dans le monde de la prévention incendie ainsi que dans l’univers de la construction.

Date de publication
16-09-2015
Revision
05-11-2015

En première lecture nous pouvons voir, ou avoir l’impression, que les changements assouplissent les exigences de la législation 2003, alors que dans plusieurs situations l’assouplissement donné dans les généralités est assorti de beaucoup de particularités en fonction de l’affectation et/ou de la géométrie du bâtiment. Donc attention, dans le millésime 2015 de la protection incendie, l’adage populaire selon lequel « le diable se cache dans les détails » se vérifie fréquemment.

Quelles sont ces modifications importantes, voire fondamentales pour la prévention incendie dans un projet de construction ?

Objectifs identiques


Les objectifs de protection définis dans la version 2003 ont été repris sans modification, la manière de les atteindre s’est élargie. Les nouvelles Directives de protection incendie (DPI) favorisent, pour les nouvelles constructions, la tendance à diminuer les moyens de protection incendie par la construction en considérant les concepts de « construction » et les concepts « techniques » (installation d’extinction) en tant que concepts standards, en exigeant la mise en place de mesures d’organisation renforcées.

Dans le cadre de projets à caractères spéciaux pour lesquels les concepts standards ne peuvent s’appliquer, il est admis de recourir à des concepts alternatifs reposant sur l’ingénierie de protection incendie, pour autant que les objectifs définis soient atteints.

Une DPI « Assurance qualité en protection incendie » a été mise en œuvre afin de limiter, voire de supprimer les défauts de conception et/ou d’installation. Elle définit et réglemente les critères et conditions cadres qualitatives.

Elle donne les critères de choix pour le niveau d’AQ ainsi que les qualifications et les tâches des responsables assurance qualité pour l’ensemble du projet de construction. Pour la phase d’exploitation qui couvre toute la vie du bâtiment, elle fixe les responsabilités du propriétaire ou de l’exploitant.

Dans la DPI « Protection incendie organisationnelle », il ne s’agit pas que de traiter de sécurité incendie au sens large, mais surtout de mettre en place les mesures d’organisation pour la vie du bâtiment. Les responsabilités du propriétaire ou de l’exploitant ainsi que la nécessité, les tâches et responsabilités d’un chargé de sécurité dans la phase d’exploitation sont traitées dans cette DPI. 

De nouvelles règles touchant la construction s’y sont ajoutées, en particulier sur les mises en exploitation partielles et les rénovations en cours d’exploitation. Parmi les nouvelles mesures introduites touchant l’alarme, certaines affectations doivent disposer de dispositifs d’alarme par messages sonores. 

Termes et définitions: éliminer les ambiguïtés


Avant d’aborder les principales adaptations portées aux directives concernant les produits de construction, notons que les différentes définitions ont été regroupées dans une nouvelle DPI « Termes et définitions ». Elles ont été adaptées et complétées en vue d’éliminer les ambiguïtés. Les mesures de protection incendie ne reposent désormais plus sur le nombre de niveaux, mais sur la géométrie du bâtiment, définition reprise de l’ Accord intercantonal harmonisant la terminologie dans le domaine des constructions (AIHC). Cette classification des bâtiments par leur géométrie a été fixée, en fonction des possibilités de lutte contre le feu par les sapeurs-pompiers, en accord avec la Conférence suisse des inspecteurs sapeurs-pompiers.

La DPI « Matériaux et éléments de construction » réglemente les classifications des produits de construction utilisables en Suisse, ceci par des tests quant à leur réaction au feu et à leur résistance au feu. Les classifications européennes nouvelles ou manquantes dans la version 2003 ont été introduites. La principale modification touche la notion de combustibilité des matériaux de construction. 

Pour pouvoir prendre en compte les 20 possibilités de classification selon les tests AEAI, et intégrer les 287 classifications possibles selon les normes SN-EN en vigueur, il a été créé quatre groupes de réaction au feu (RF1-RF4), complétés par une catégorie particulière, dite « critique » pour les matériaux qui dégagent une importante fumée, qui produisent des gouttes en fusion ou encore des gaz corrosifs.

Les tableaux de la DPI « Utilisation des matériaux et éléments de constructions » définissent les exigences pour les différentes parties de construction (façades, parois intérieures, etc.) selon les quatre groupes de réaction au feu. Dans une seconde phase, le choix se fera en fonction des 307 classifications possibles, réparties dans les quatre groupes.

Modifications importantes


Dans la DPI « Distances de sécurité, Structure porteuse et Compartimentage », plusieurs modifications importantes ont été introduites. Ces sujets sont regroupés dans une seule directive. En ce qui concerne les distances de sécurité, la distinction des bâtiments en fonction de leur géométrie (hauteur) permet des réglementations différenciées, appropriées à la situation, mais attention aux détails. Par exemple, les bâtiments annexes, dont la surface a été portée à 150 m2, ne nécessitent pas de distance de sécurité avec le bâtiment principal. Par contre, il est exigé quatre mètres entre annexes de la même propriété. Autre modification dans ce domaine, aucune distance de sécurité n’est exigée entre les bâtiments d’affectation similaire et présentant le même danger d’incendie situés sur une aire de 3600 m2. En cas de distances de sécurité insuffisantes, les annexes de la directive proposent des mesures compensatoires. 

Le choix de la résistance au feu du système porteur se fait en fonction de la géométrie du bâtiment au moyen de tableaux incluant la résistance au feu des dalles d’étage, des compartiments coupe-feu et voies d’évacuation horizontales ainsi que des voies d’évacuation verticales. Les différentes résistances au feu sont présentées selon le type de concept choisi, construction ou installation d’extinction.

Une nouvelle catégorie de bâtiment a été créée, ce sont les bâtiments de taille réduite pour lesquels la géométrie et les exigences de protection incendie sont spécifiquement définies. 

Dans le domaine des voies d’évacuation, le calcul du nombre de voies d’évacuation verticales à partir de 900 m2 se fait sur la base des longueurs de voies d’évacuation horizontales et non plus au prorata de la surface du niveau. A noter le passage à 35 mètres de la longueur des voies d’évacuation horizontales pour une seule issue de secours (à trois exceptions près). 

La DPI « Méthodes de preuves en protection incendie » traite, dans le sens de l’assurance qualité, du déroulement de l’étude et de la méthodologie de travail pour les ingénieurs. Le but final étant d’unifier les méthodes d’ingénierie en protection incendie (désenfumage [DPI spécifique], évacuation et calcul de structures porteuses) sur l’ensemble des cantons et ainsi de permettre aux autorités de traiter les cas de manière semblable. Toutefois, le concept global reste l’élément clé réunissant l’ensemble des règles applicables.

Les quelques directives abordées sont les principales sur lesquelles se posent actuellement le plus d’interrogations, mais l’ensemble des directives et la norme de cette nouvelle législation forment véritablement une entité. Cette législation s’est-elle assouplie ou est-elle devenue plus restrictive par rapport à celle de 2003 ? Ce n’est qu’après un certain nombre de mises en œuvre simples ou complexes qu’un jugement objectif pourra être posé.

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