Ri­deau!

Densification à Bâle: Itten + Brechbühl Architekten ont ajouté un nouvel immeuble d’habitation dans l’arrière-cour d’un bâtiment en bordure d’îlot. Avec sa matière élégante, la façade-rideau, verte ondulée, aux détails subtils en fibres-ciment exprime de la sympathie.

Date de publication
18-07-2022

Dans le quartier bâlois d’Iselin, une drôle de «bestiole» verte à l’étrange géométrie émerge d’une construction en bordure d’îlot. Dans cette ancienne cité ouvrière avec ses lotissements à cour intérieure fermée, le bloc pentagonal reste ouvert à l’ouest. Cet interstice livre accès au nouvel immeuble résidentiel dans la cour. Son enveloppe en fibresciment, ondulée et lasurée vert, évoque un rideau solide au toucher doux: pour accéder à l’entrée du bâtiment disposé au centre, un sentier longe la façade, invitant à explorer la matière au plus près.

Autrefois, l’arrièrecour servait à entreposer des calèches, puis des véhicules à moteur et enfin un commerce de matériaux de construction. Au centre, les distances minimales légales ont permis de dégager une surface résiduelle constructible à laquelle fait écho le volume étroit de la construction nouvelle étiré sur cinq étages. Ce volume peut accueillir 21 personnes dans des appartements de 2,5 à 5,5 pièces d’une superficie de 56 à 130 m2. Situé dans une cour densément bâtie, le corps de bâtiment offre peu de recul. Les architectes ont conçu un objet au toucher séduisant et comme coulé directement dans la cour.

Des matériaux de construction industriels subtilement ennoblis

Le projet portait sur une maison simple, qui rappelle l’ancienne architecture des ateliers et perpétue le souvenir du lieu. La forme et les matériaux sont dictés par le caractère des bâtiments utilitaires des cours du quartier et non par la construction en bordure d’îlot. Fidèles à l’esprit industriel, des matériaux sans prétention tels que le béton apparent, l’acier galvanisé à chaud et l’Eternit ondulé revêtu d’un glacis sont utilisés. L’architecte en chef Daniel Blum du bureau Itten+Brechbühl insiste sur le parti pris d’ennoblissement des matériaux: des essais ont été réalisé sur la nature de la surface de l’Eternit tout au long d’une année de développement. Le choix s’est porté sur des panneaux bruts et un glacis ultérieur pour faire ressortir l’aspect pelucheux de la structure en fibresciment du matériau. Pour l’entrepreneur général, la mise en œuvre de produits non traités était inhabituelle du fait des garanties et des questions de responsabilité. Un obstacle que les parties prenantes ont contourné en séparant la responsabilité globale du matériau de base et du produit de revêtement entre le fabricant (Eternit Suisse) et l’entreprise responsable du traitement de surface (Durrer Systems).

L’étage en attique construit en retrait est habillé de panneaux lisses et gris, contrairement aux quatre étages inférieurs avec leur façade ondulée traitée en vert. Les bandes de façade périphériques ainsi que les dalles entre étages en saillie soulignent l’horizontalité du volume tout en y intégrant les espaces extérieurs privatifs. Tantôt les balcons se blottissent contre le corps du bâtiment, tantôt ils s’expriment en saillies. En général, ils relient deux pièces, conférant ainsi aux appartements un aspect spacieux. Les façades arrière fonctionnelles sont inspirées des très prisées «maisons Baumgartner» bâloises des années 1930. Les balustres des balcons en acier galvanisé à chaud sont un produit standard qui doit son caractère particulier aux points de soudure entrecroisés. Les volets roulants métalliques ouverts obéissent aussi au principe de l’élégance industrielle. La structure porteuse est séparée de la façade.

Une embrasure ondulante

La façade non porteuse en éléments de bois a été exécutée dans une ossature traitée pour être isolante et étanche à la vapeur. Les panneaux d’Eternit de 8 mm sont vissés sur le lattage vertical servant de couche de ventilation arrière; les panneaux peuvent être remplacés un à un en cas de besoin. Les raccords des embrasures des fenêtres bois-aluminium posées en retrait ont nécessité une coordination particulière. Devant la tôle métallique de l’embrasure de fenêtre, le montage renforce l’illusion de rideau.

L’atmosphère intérieure est dictée par des matériaux bruts et raffinés. La cage d’escalier toute en longueur assure une circulation efficace entre les cinq appartements de l’étage. Elle est réalisée en pierre artificielle en terrazzo, en surfaces de bois brut de sciage et en ouvrages métalliques thermolaqués vert foncé. La balustrade de balcon y est également très présente. Des portes en bois à hauteur de plafond créent une atmosphère spacieuse dans les appartements parfois compacts. Aux dires d’un locataire, chaque étage a «ses propres colocataires» sous la forme de piliers porteurs avec des sections ovales, rondes ou rectangulaires. Les plans des appartements manquent parfois de la virtuosité du cubage du bâtiment; l’orientation sur plusieurs côtés répare toutefois ces torts en offrant des vues et des perspectives captivantes.

Cet article a été publié dans le numéro spécial  «Fassaden | Façades | Facciate – Constructions contemporaines en Suisse».

Immeuble résidentiel Hegenheimerstrasse 39, Bâle
Client
Musfeld, Bâle

 

Planification générale, architecture
Itten + Brechbühl, Bâle

 

Structure porteuse
Schnetzer Puskas Ingenieure, Bâle

 

Architecte paysagiste
Bryum, Bâle

 

Installations du bâtiment
RaimanPartner, Trimbach

 

Planification électrique
Bhend Elektroplan, Bâle

 

Facts & Figures
Planification
2017

 

Début des travaux
2019

 

Mise en service
novembre 2020

 

Surface de plancher
2150 m2

 

Nombre de logements
21

 

Installation PV sur le toit
superficie: 111 m2; puissance de l’installation: 23.5 kWc

 

Distinction
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