Pers­pec­tives con­jonc­tu­relles pour la branche des études au 3e tri­mestre 2015 : ar­chi­tectes et in­gé­nieurs res­tent se­reins

L’économie suisse n’a pas encore digéré toutes les répercussions de la force du franc. Pour la plupart, les bureaux d’études ne s’en disent toutefois pas affectés, mais les architectes se montrent plus confiants que les ingénieurs.

Date de publication
01-10-2015
Revision
08-10-2015

L’économie suisse ne s’est pas encore adaptée aux nouvelles conditions résultant de l’abandon du taux plancher du franc. Bien que l’Indicateur Export des PME publié par le Crédit Suisse indique une demande étrangère en hausse, celle-ci ne se répercute que faiblement en Suisse en raison du niveau des cours de change. Les perspectives sont donc au plus bas niveau: seul un quart des PME sondées table encore sur une hausse des exportations pour le trimestre en cours. Dans sept secteurs sur huit, les entreprises s’attendent ainsi à une chute des volumes à l’export, les prévisions les plus pessimistes émanant des sociétés actives dans le secteur pharmaceutique et chimique. Par contraste, l’économie intérieure demeure stable jusqu’ici.

La baisse des prix accroît le pouvoir d’achat


La force du franc se traduit par une hausse du pouvoir d’achat : en milieu d’année, les prix du pétrole et du gaz naturel importés s’établissaient ainsi 30% au-dessous de leur niveau d’il y a douze mois. De même, les prix des importations de fer et d’acier ont baissé de 20% durant la même période, entraînant une réduction des coûts pour les entreprises de construction et les branches industrielles. Les prix de la construction compilés par l’Office fédéral de la statistique (OFS) pour le premier semestre 2015 affichent une baisse de 0,9% par rapport à l’année précédente. Quant à l’indice zurichois des prix de la construction de logements, il s’est replié de 1,2% entre avril 2014 et avril 2015 pour atteindre 101,0 points (base avril 2010 = 100), tandis qu’il avait encore augmenté de 0,5% l’année précédente.

Dans la construction, la conjoncture est encore bonne 


A la suite du ralentissement de la croissance observable depuis 2013, le Secrétariat d’Etat à l’économie (SECO) table sur une légère réduction des investissements dans la construction. Le taux d’activité dans la branche, tout comme les réserves de travail et les entrées de commandes sont en recul. Dans leurs analyses, le SECO ainsi que Batimag précisent cependant que les carnets de commandes affichent encore un niveau «élevé» (SECO) respectivement «confortable» (Batimag). Cela étant, les signes d’un affaiblissement conjoncturel parfois marqué se multiplient pour la construction. La tendance de l’indicateur KOF-Batimag est à la baisse pour 2015 et les pronostics pour 2016 affichent un net recul.

Architectes plus optimistes que les ingénieurs


Globalement, cette évolution s’applique aussi à la branche des études, comme le montrent les derniers résultats de l’enquête trimestrielle menée par le Centre de recherches conjoncturelles de l’EPFZ (KOF). Il en ressort que quelque 50% des bureaux interrogés jugent bonne la situation actuelle de leurs affaires. Au cours des années 2012 et 2013, ils étaient régulièrement plus de 60 % dans ce cas, puis ce pourcentage a commencé à reculer début 2014, repassant sous la marque des 60% pour la première fois depuis 2011 pour atteindre des valeurs de 50% à la fin de l’année. Pour le semestre à venir toutefois, tant les architectes que les ingénieurs tablent sur un redressement, même si des annonces d’une réduction de la demande se font aussi entendre. L’évaluation des carnets de commandes livre des résultats très contrastés: environ un sixième des bureaux table sur une amélioration, tandis qu’une part presque équivalente s’attend à un affaiblissement. Comme lors des derniers mois, ce sont à nouveau les ingénieurs qui voient l’avenir avec le moins de confiance. Ils craignent des honoraires en baisse et continuent à déplorer le manque de personnel qualifié.

La construction de logements soutient la demande


Selon le KOF, le ralentissement dans la branche des études peut être attribué à la faible estimation de la valeur des futurs investissements dans la construction. Corrigée des variations saisonnières, cette valeur s’est en effet nettement contractée par rapport au trimestre précédent. Un quart des bureaux pronostique ainsi une évolution négative dans le secteur industriel-artisanal, perspective qui revient comme un leitmotiv dans les récentes enquêtes. Mais les investissements des pouvoirs publics marquent aussi fortement le pas, avec un recul annoncé par environ un quart des bureaux. En contrepartie, les architectes signalent toujours une activité soutenue dans la construction de logements, dont les volumes compensent sans doute une bonne partie du repli dans les autres secteurs.

Augmentation du risque de bulle immobilière?


La bonne tenue persistante des affaires dans les branches des études et de la construction doit être appréhendée dans le contexte de taux d’intérêt favorables, qui motivent fortement les investisseurs à concevoir et réaliser des logements destinés à la location malgré le danger de surproduction. En août, le financement à long terme de l’acquisition d’un logement est en effet devenu encore plus avantageux. Selon le Swiss Real Estate Bubble Index publié par l’UBS, même Appenzell Rhodes intérieures, où les prix ont augmenté de près de 70% au cours de la dernière décennie, a maintenant rejoint les régions avec potentiel de correction élevé. Il y a deux mois, la Banque nationale suisse (BNS) a déjà publié une mise en garde à ce propos dans son rapport sur la stabilité financière: la baisse des taux d’intérêt enregistrée depuis janvier 2015 accroît le risque de voir encore augmenter les déséquilibres sur les marchés hypothécaire et immobilier. La propension des investisseurs à accepter des risques croissants pourrait donc peser sur ces marchés en cas de retournement des taux.

La BNS observe l’activité des investisseurs et des banques


D’une part, la demande croissante de la part des investisseurs, en matière de rendements locatifs notamment, est susceptible de pousser encore davantage les prix vers le haut. La BNS a donc résolu de renforcer sa surveillance sur ces secteurs d’investissement. A côté des caisses de pension et d’autres investisseurs institutionnels, des sociétés de capitaux qui implantent de gros projets dans des endroits plutôt défavorables en Suisse sont ainsi concernées. D’autre part, la BNS considère que l’environnement inédit des taux actuels pousse les banques à prendre des risques tarifaires et de crédits accrus, ce qui les fragiliserait face à des infléchissements substantiels des taux et des corrections de prix sur les marchés hypothécaire et immobilier. Au besoin, la BNS se réserve de corriger la donne par des mesures anticycliques sur le marché des capitaux.

David Fässler, directeur de SIA-Service, avocat, M.B.A., david.faessler [at] sia.ch

 

 

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L’enquête conjoncturelle du Centre de recherches conjoncturelles (KOF) de l’EPFZ pour la branche des études est un sondage réalisé auprès de bureaux d’architecture et d’ingénierie suisses qui y participent volontairement. Les questionnaires portent sur l’évaluation des activités récentes, présentes et futures de l’entreprise.
Si vous souhaitez participer à cette enquête, il vous suffit de remplir le questionnaire en ligne à l’adresse : http://survey.kof.ethz.ch. Vous pouvez également tester le questionnaire en ligne sans engagement.
Informations complémentaires: www.kof.ethz.ch

 
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