Ni low, ni high: Ar­chi­zoom vs les zom­bies tech­no­lo­giques

Date de publication
22-04-2024

Pour son exposition printanière, Archizoom présente une impressionnante collection d’artefacts qui déjouent la vieille dichotomie entre low et high-tech. Une idée lumineuse dans notre époque obscure qui oppose volontiers des camps (les tenants de l’innovation, d’un côté, ceux de la décroissance, de l’autre). L’exposition s’intéresse ici à l’architecture au prisme de l’énergie; mais au lieu de présenter de complexes dispositifs, elle incite à regarder les usages des technologies; comment celles-ci sont concrètement employées, détournées; comment la plupart sont déjà «zombies» car défaillantes ou obsolètes, mais encore en usage. De manière ludique, poétique, parfois franchement loufoque, les projets puisés dans la production des cinquante dernières années déjouent ainsi une opposition qui n’a plus cours. D’une part parce que même les technologies les plus primitives retrouvent une actualité, de l’autre parce que même les plus raffinées ont parfois besoin de rafistolage pour fonctionner – à l’image des bandes de scotch employées pour ramener Apollo 13 sur Terre en 1970.

Cette décennie est d’ailleurs particulièrement à l’honneur: on trouvera ainsi des inventions de Félix Trombe (l’inventeur du mur chauffant portant son nom) ou une analyse d’ensoleillement d’une maison de Ghardaïa par les stagiaires d’André Ravéreau envoyés dans la vallée du M’zab (Algérie) au milieu des années 1970. Tout à côté sont présentés des projets d’agences d’architecture contemporaines conçus comme des dispositifs de captation de l’énergie solaire ou de ventilation à grande échelle. Rhizomatique, artistique, parfois un peu cryptique, l’exposition propose des livres, vidéos et maquettes d’auteurs et architectes technocritiques célébrés (Cedric Price, R. Buckminster Fuller, Frei Otto, Viktor Papanek, etc.) et invite en conférence trois philosophes et anthropologues contemporains. Ce faisant, les commissaires évitent de se confronter à d’autres spécialistes, maintenus à distance : les ingénieurs spécialisés et les physiciens du bâtiment, qui auraient pu considérablement enrichir le propos. Ce choix risque d’accentuer encore cette obscure distinction entre cultures low et high avec laquelle nous devrions aussi rompre.

Exposition et conférences – jusqu’au 13.05.24
High Tech Low Tech
Archizoom, EPFL
archizoom.ch

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