Les bu­reaux d’études en bonne forme

Non seulement les bureaux d’études considèrent leur situation économique stable à quelques bémols près, mais en plus ils tablent sur une légère amélioration. C’est ce qui ressort de la dernière enquête du Centre de recherches conjoncturelles de l’ETH (KOF).

Date de publication
25-05-2023

Après des mois de grisaille économique, les résultats de l’enquête menée en avril 2023 auprès de la branche des études donnent du baume au cœur. En effet, il apparaît que la situation bénéficiaire des bureaux a connu une nette amélioration au cours des trois derniers mois et que la demande a évolué de manière légèrement plus positive qu’en janvier. En revanche, le développement de la fourniture de prestations s’est légèrement dégradé au cours des trois mois passés. Sur le front des ressources humaines, ils ont significativement revu à la hausse l’évolution de leur effectif. Seule ombre au tableau, par rapport à janvier, les bureaux d’études se disent nettement plus insatisfaits de leur carnet de commandes.

Cela n’entame toutefois pas leur optimisme puisqu’ils escomptent une légère amélioration de leur situation économique dans un avenir proche et tablent sur une évolution similaire de la fourniture de prestations et de la demande dans les trois prochains mois. Dernier point, leurs attentes concernant leur situation bénéficiaire future restent inchangées.

Architectes: des hauts et des bas

Par rapport à la dernière enquête, les architectes se disent légèrement plus satisfaits de leur situation économique et ont révisé à la hausse l’évolution de leur situation bénéficiaire au cours des trois derniers mois — ce alors que la demande, les carnets de commande et la fourniture de prestations ont continué de s’essouffler. Bien qu’étant toujours affectés par la pénurie de main-d’œuvre, les bureaux d’architecture indiquent que le problème s’est atténué et avancent les meilleurs résultats depuis le printemps 2020.

Leurs prévisions pour les prochains mois tiennent des montagnes russes. Par rapport à janvier, ils révisent ainsi leurs attentes concernant la marche de leurs affaires dans les six prochains mois légèrement à la baisse. Ils sont aussi un peu moins optimistes pour ce qui est de leur situation bénéficiaire à venir même si la tendance générale reste favorable. Dans le même temps, ils misent sur une amélioration de la demande au prochain trimestre. Sur le front des prix en revanche, les attentes des architectes restent stables: 17% des bureaux escomptent une augmentation au prochain trimestre, 6% une baisse, tandis qu’une très large majorité de 77% estime que les niveaux actuels se maintiendront.

Ingénieurs: humeur au beau fixe

Concernant leur situation économique actuelle, les taux de satisfaction des ingénieurs restent aux mêmes niveaux qu’en début d’année. Au cours des trois derniers mois, la demande ainsi que la fourniture de prestations ont évolué favorablement, tandis que la situation bénéficiaire, très satisfaisante, reste inchangée. Bien que les bureaux d’ingénierie fassent état d’un renforcement de leurs effectifs au cours des trois derniers mois, ils n’en considèrent pas moins qu’ils sont nettement insuffisants. Rien d’étonnant dès lors à ce 71% indiquent que la pénurie de main-d’œuvre constitue un frein à leur activité. Depuis le début de l’année, les carnets de commande ont reculé de 0,3 mois pour s’établir à 10,6 mois au deuxième trimestre 2023.

Ceci n’entame toutefois pas leur moral, puisque l’embellie se confirme pour ce qui de leurs attentes relatives à la marche de leurs affaires des six prochains mois et à l’évolution de la demande, de la fourniture de prestations et de la situation bénéficiaire du trimestre à venir. Sachez encore que 25% des bureaux escomptent une augmentation des prix au trimestre à venir et que seuls 4% s’attendent à une baisse.

Stable mais pas infaillible

L’un dans l’autre, la marche des affaires des bureaux d’études reste stable dans un horizon proche, à l’image de la situation économique de la Suisse. Dans un communiqué publié début mai, le KOF indique que le paysage conjoncturel suisse est inégal, les secteurs d’activité évoluant différemment. La conjoncture est légèrement grippée mais affiche aussi des signaux encourageants. Ce constat est partagé par Pierre-Olivier Gourinchas, conseiller économique et directeur des études du FMI. Dans un entretien accordé à la Sonntagszeitung en avril, il a ainsi affirmé que certains problèmes tels que les répercussions économiques de la pandémie et la flambée des prix de l’énergie ont été surmontés, mais que d’anciens et nouveaux périls couvent qui, s’ils se réalisent, pourraient tout remettre en question, citant comme exemple les turbulences dans le secteur bancaire. Non sans raison comme le démontreront quelques semaines plus tard les faillites des banques américaines First Republic, Silicon Valley Bank, Signature Bank et finalement de l’ancien fleuron national, Credit Suisse. À première vue, la raison derrière ces banqueroutes est vite trouvée : mauvaises stratégies, mauvaise gestion, contrôle des risques insuffisant. Mais le fond du problème est ailleurs. En effet, si les clients n’avaient pas retiré leurs fonds dès que les difficultés de ces institutions bancaires ont été rendues publiques, les événements n’auraient pas pris la même tournure. C’est donc en premier lieu un manque de confiance qui a précipité leur fin.

Le ciment des relations

La confiance est la pierre angulaire de toute relation, que ce soit dans la vie privée ou les affaires. Dans le domaine de la psychologie, elle est assimilée à un comportement inculqué. Au terme de sa réflexion sur les différentes composantes sémantiques de la notion de confiance, Laurent (2012) la définit comme «une espérance de fiabilité dans les conduites humaines (…) dans le cadre d’une situation incertaine, dans un but et un contexte précis, cette espérance de fiabilité étant le fruit d’une volonté individuelle.» Cette définition se démarque des définitions fournies par les dictionnaires courants en ce qu’elle éclaire une dimension primordiale: la confiance résulte d’un pari implicite sur la compétence, la fiabilité et l’intégrité d’autrui.

Ce dernier élément est essentiel, car il s’agit de l’adéquation entre la parole et les actes. Autrement dit, rien ne sert de faire de grandes promesses, de publier des déclarations d’intention sur un site web ou d’élaborer des stratégies de compliance si elles ne sont pas suivies d’effets. Et si tout ne se passe pas comme prévu, la conduite à adopter doit être dictée par la transparence et la sincérité, et l’état d’esprit doit être celui du remords actif — qui se traduit dans les faits par le dédommagement des parties lésées et l’abandon des pratiques à l’origine de l’incident.

Que ce soit en tant qu’actrices économiques ou employeuses, les entreprises feraient bien de ne pas sous-estimer l’importance de la confiance, bien immatériel dont la valeur est inestimable. Retenons que comme le professait Sénèque à l’époque de la Rome antique: les difficultés ne sont pas la source du manque de confiance, mais le manque de confiance est la source des difficultés.

Note

 

1. Laurent, Éloi. «I / Les définitions de la confiance», Éloi Laurent éd., Économie de la confianceLa Découverte, 2012, pp. 17-24.

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