La pierre triste

Projection dans le cadre du cyle L’architecture à l’écran

Date de publication
14-09-2016
Revision
15-09-2016

Récit cinématographique d’une ville, La pierre triste perd de vue l’objectif qu’il se fixe pour mieux le retrouver dans l’objet de sa distraction. Le point de départ est l’archive filmique, sur une décennie, des fouilles archéologiques préventives dans la ville industrielle d’Eleusis, au sud d’Athènes. Grand centre de pèlerinage du monde antique, Eleusis est devenue une banlieue pauvre et Philippos Koutsaftis choisit d’en saisir la lente transformation. Prévenu à chaque fois par les archéologues, il arrive toujours au bon moment : celui où sort de terre un fragment du temps disparu. Ses allées et venues planifiées croisent celles d’un étrange personnage, un clochard céleste paranoïaque et méticuleux, qui cherche dans les décharges les tas de gravats que les archéologues ont jugés sans intérêt. 

Panagiotis Farmakis trouve régulièrement des pièces antiques, des fragments, des objets d’une valeur inestimable qu’il ramène à son tour au musée archéologique. 

Il permet au cinéaste de quitter sa trajectoire bien tracée, révélant ainsi, tel une théophanie, le sens anthropologique du temps. Les mystères d’Eleusis consistaient en une initiation ; celui qui savait introduisait celui qui ne savait pas encore dans le cercle fermé des détenteurs de la vérité. Il n’est pas exagéré de considérer que le film de Philippos Koutsaftis est une véritable initiation cinématographique, autrement dit un apprentissage du temps. 

Film tourné sur plus de dix ans, La pierre triste est au documentaire ce que la folie d’ Antonin Artaud est au théâtre : une expérience qui pulvérise, par sa façon de les accomplir, les prémisses d’un art. Montré en salle en 2001, il rencontra un succès inégalé pour un film de ce genre. Frôlant la fréquentation des blockbusters, il marqua par sa sensibilité et sa précieuse tristesse toute une génération.

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