Chro­nique d’une chute an­non­cée

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Le Silo se penche ici sur le film "The Fountainhead" de King Vidor. Un long métrage adapté du roman homonyme dans lequel l'auteure, Ayn Rand, propose une vision du sublime architectural

Date de publication
19-03-2013
Revision
23-10-2015

Elle nous avait prévenus : « Si vous voulez savoir ce qu’est le sublime, venez à New York. Tenez-vous debout sur les bords du fleuve Hudson face à Manhattan. Regardez la ligne d’horizon, et agenouillez-vous. » Dans son roman The Fountainhead (La Source vive, 1943), l’auteure Ayn Rand propose une vision du sublime architectural en même temps qu’elle affirme sa fascination pour l’individualisme radical. Howard Roark est l’architecte du sublime. La robustesse de sa constitution physique est à l’image de ses convictions. Son humeur inflexible nourrit sa vocation d’architecte ainsi que son sens du bâtir. Howard Roark est le sublime en personne. Du latin sublimis, « qui va en s’élevant » ou « qui se tient en l’air », le concept esthétique du sublime renvoie au vertige des hauteurs. Pour Kant, le sublime est la réjouissante impuissance que provoque l’« absolument grand », au-delà de toute comparaison. Et l’« absolument grand » ne peut se contenir.
En 1949, King Vidor signe l’une des plus belles adaptations d’un roman au cinéma. Howard Roark à l’écran est aussi beau et arrogant que son alter ego littéraire. En devenant pendant le tournage du film un couple (illégitime) dans la vie, le couple cinématographique que Gary Cooper forme avec Patricia Neal accroît encore la séduction du personnage. Vers la fin du film, le tempérament conflictuel de Roark le conduit au tribunal. Accusé d’avoir provoqué l’explosion d’un bâtiment qu’il a conçu mais dont les plans n’ont pas été respectés, l’architecte livre son manifeste de la démesure. Il offre alors un plaidoyer en faveur de l’individualisme au détriment des valeurs collectives. On a souvent assimilé le personnage de Howard Roark à Frank Lloyd Wright. Mais peu importe. En construisant le plus haut gratte-ciel de New York – The Wynard Building – Roark connaitra son propre moment de gloire « absolue ». Un moment qui ne fait hélas qu’augurer sa chute.

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