Pe­ter Märkli : des­sins

Une publication rend hommage à la prolifique œuvre dessinée de l’architecte suisse.

Date de publication
13-01-2016
Revision
13-01-2016

Le livre Peter Märkli. Zeichnungen/Drawings paru chez Quart Verlag et édité par les jeunes architectes italiens Fabio Don et Claudia Mion nous plonge dans l’univers dessiné de l’architecte, à partir du début des années 1980. Belle exception parmi ses collègues zurichois, l’œuvre dessinée de Peter Märkli est au moins aussi intéressante que son œuvre architecturale. Les quelque 300 dessins reproduits dans le livre ne sont que rarement signés et jamais titrés ni datés. La grande majorité d’entre eux ressemblent à des élévations en deux dimensions. Ce sont des façades de maisons ou d’immeubles imaginées, figurées et que très rarement réalisées par l’architecte. Derrière la première apparence d’esquisses d’architecture, ce sont les dessins d’un artiste que nous fait découvrir le livre. Leur observation attentive renvoie à l’imaginaire et aux références d’un architecte doublé d’un homme de l’art: celui du dessin. 

Peter Märkli utilise toujours la même technique : mine ou stylo bille avec parfois des crayons de couleur sur des feuilles de papier simples, souvent des formats A4. A première vue, l’épaisseur de l’ouvrage, la profusion des dessins et l’uniformité de la technique et des supports employés procure au livre l’allure d’un volumineux catalogue divisé chronologiquement en deux parties successives. La première couvre les dessins des 20 premières années et la seconde rassemble ceux des 15 dernières. En y regardant de plus près, le catalogue est rythmé par sept textes rédigés par des architectes, des enseignants ou des curateurs qui ont de près ou de loin fréquenté Peter Märkli ou son œuvre. A la lecture de ces textes, les dessins dévoilent peu à peu une partie de leur mystère et les différentes facettes de l’œuvre de l’architecte et artiste. 

Parmi les œuvres sélectionnées dans l’ouvrage, quelques-unes renvoient aux projets architecturaux emblématiques de Peter Märkli. Pour les initiés de l’œuvre de l’architecte suisse, en fouillant dans les pages du livre, on devine la toiture en pente et les pilotis du Dominica Project, dessiné en 1991. Ailleurs, des façades aveugles simplement percées d’une porte rappellent celles du musée la Congiunta réalisé en 1992 dans le Tessin. Dans d’autres dessins, les épaisses colonnes d’ordre classique sont semblables à celles réalisées pour la maison Kuehnis en 1982. Nonobstant, la très grande majorité des dessins gardent leur autonomie. Ils ne se référent pas à des architectures construites par Peter Märkli. Ils dévoilent plutôt l’imaginaire d’un homme parcouru par d’autres préoccupations que celle de bâtir à tout prix. Comme le fait remarquer Kenjiro Hosaka dans son texte Towards a vital architecture (pp. 188-193), la palette chromatique et les procédés compositionnels employés par Peter Märkli font fortement penser aux dessins d’un Kasimir Malevitch, Paul Klee ou encore à ceux de son mentor et ami Hans Josephsohn. Avec le choix des dessins et les textes qui les accompagnent, les auteurs du livre veulent dévoiler l’œuvre dessinée de l’artiste, bien plus que l’œuvre architecturale.  

Le livre se termine sur une conversation avec l’architecte et artiste russe Alexander Brodsky à propos des dessins de Peter Märkli1. Les deux artistes partagent la passion du dessin. Non pas le dessin comme outil obligé de la conception architecturale mais comme une finalité artistique autonome. Et c’est bien là que réside l’intérêt principal du livre: il rappelle aux architectes le plaisir de dessiner. Construire n’est pas nécessairement la finalité.


Note

1. L’atelier Alexander Brodsky à Moscou a accueilli une     exposition des dessins de Peter Märkli en 2014.  

Peter Märkli. Zeichnungen/Drawings

 

 

Edité par Fabio Don et Claudia Mion, Quart Verlag, Lucerne, 2015 / Fr. 89.– 

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