«Je veux m’en­ga­ger pour un cadre de vie du­rable»

Le nouveau directeur de la SIA, Christoph Starck, ne craint pas les divergences d’opinion. Le credo de celui qui se considère comme un rassembleur: l’union fait la force.

Date de publication
07-11-2019

SIA: Vous êtes entré en fonction début novembre. De quoi avez-vous le plus hâte?
Christoph Starck: Conformément aux statuts et principes directeurs de la SIA, cette dernière œuvre en faveur d’un cadre de vie durable. Voilà un engagement que je partage, en tant qu’ingénieur forestier, en tant que membre de la SIA, en tant que père de quatre enfants d’âge scolaire et, naturellement, en ma qualité de nouveau directeur.
La SIA, qui réunit tant de brillants cerveaux, offre un cadre de travail particulièrement stimulant et enrichissant. Sans compter que les meilleurs experts s’engagent bénévolement au sein des commissions, des conseils d’experts, du comité. Merci à eux !

À ce propos, ce système de milice touche à ses limites. A-t-il un avenir?
Une question épineuse ! Une option serait de réduire la charge horaire de l’engagement bénévole en le limitant à une dimension réflexive et stratégique axée sur la formulation d’idées. Le soin de concrétiser et d’affiner le projet serait alors délégué au bureau.
Ma conception de la SIA n’est pas celle d’une organisation hiérarchique, mais celle d’un réseau au fonctionnement fascinant. Naturellement, il y a l’assemblée des délégués, qui définit les grandes orientations, et le comité, qui prend les décisions stratégiques. Mais il s’agit de relayer ces impulsions au sein des commissions. L’enjeu devient crucial : comment pouvons-nous, en tant que réseau, parvenir à nous coordonner ? Une autre question essentielle touche au développement du patrimoine construit en Suisse : il s’agit d’en définir les contours.

Pensez-vous pouvoir puiser dans vos 16 ans d’expérience à la tête de Lignum, dans le cadre de vos nouvelles fonctions?
Lignum, comme la SIA, est une organisation hétérogène : des mondes séparent un forestier d’un menuisier. Fédérer des personnes d’horizons différents, définir des objectifs en commun tout en conciliant des attentes diverses : telle était ma mission chez Lignum. C’est aussi mon moteur… Au sein de la SIA, je me considère comme un généraliste dont la tâche est de faire émerger un dénominateur commun à partir d’intérêts particuliers.
En matière de management, appliquez-vous des principes particuliers ? Êtes-vous fidèle à une devise que vous souhaiteriez partager avec les collaborateurs ?

Je ne suis pas très porté sur les anglicismes managériaux ou les maximes. En revanche, je sais motiver les gens à s’engager, à accomplir des projets – en commun, je tiens à le souligner. J’aspire surtout à mettre en place les meilleures conditions de travail possibles, de manière à permettre aux collaborateurs d’évoluer en toute autonomie et de déployer leur potentiel. En contrepartie, j’attends d’eux qu’ils mettent activement à profit cet espace. Mais je dois dire que je ne doute pas de leur volonté de s’impliquer, d’exploiter leurs compétences, de trouver du sens. À cela s’ajoute le fait que la plupart dispose d’un bagage universitaire, ce qui constitue un atout non négligeable.

Sur le plan professionnel, quelles sont les valeurs que vous défendez?
Je suis ingénieur forestier et la « durabilité » est ce pour quoi je m’engage. Nous utilisons nos ressources – même non renouvelables – en toute insouciance, comme si elles étaient inépuisables. Ainsi, nous marquons l’environnement d’une empreinte indélébile et saccageons le fondement de nos existences. Je tiens à m’engager sur ce front. D’autant que la construction est l’un des secteurs qui gaspillent le plus de ressources.

À votre avis, quelles sont les clefs du succès dans la vie?
Il faut aimer ce que l’on fait. Ensuite, il s’agit d’être persévérant et de ne pas se décourager au premier échec. Dernier point: ne jamais hésiter à se montrer curieux, à apprendre de nouvelles choses.

Que faites-vous pour décompresser?
En tant que passionné de ski et de vélo, je me ressource dans la nature, avec ma famille. C’est aussi un défi que de s’organiser au quotidien avec quatre garçons de 8 à 16 ans. Mon épouse travaille à 80 % en tant que rédactrice en chef, mais enseigne aussi le yoga. Avec mon soutien dans l’éducation des enfants et les tâches ménagères, nous nous en sortons bien. Lorsque je passe le seuil de la maison, je laisse tout derrière moi. Les enfants requièrent une attention que j’ai grand plaisir à leur offrir. Rien ne me rend plus heureux que les activités en famille.

Qu’est-ce qui vous agace?
En guise de petite saillie politique, la campagne électorale. À vélo en Argovie, je vois des affiches à chaque coin de rue. Ce gaspillage de ressources me consterne. Je déplore également le niveau des débats et je doute de plus en plus de la capacité des milieux politiques à trouver des solutions aux graves problèmes de notre époque…

Voyez-vous un avenir si sombre pour la Suisse?
Absolument pas. Nous avons la chance de bénéficier d’un système stable assurant une solide continuité. Certes, les choses évoluent à un rythme plus lent que dans d’autres pays qui, à chaque renouvellement de leur gouvernement, connaissent des changements de cap brutaux. Mais la Suisse est et restera un vivier de cerveaux qui contribueront à la réinventer et stimuleront son développement. Il appartient aux organisations telles que la SIA de s’engager davantage sur le terrain politique, en ramenant le débat sur un plan plus concret.

Propos recueillis par Ivo Vasella, coresponsable Communication, porte-parole médias, ivo.vasella [at] sia.ch

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