Re­ma­nie­ment des aides à l’ap­pli­ca­tion du BIM

Avec son cahier technique SIA 2051 Building Information Modelling (BIM) – Bases pour l’application de la méthode BIM, la SIA a élaboré un instrument d’aide publié en 2018. Quelque six ans après, celui-ci doit être adapté à l’état actuel des applications concernées et à l’évolution de la normalisation.

Date de publication
25-05-2023
Raoul Müller
gestionnaire BIM et processus; responsable du groupe de travail 3, commission suisse d'accompagnement CH-BK442

Dans la branche des études pour la construction, le Building Information Modelling (BIM) était une thématique encore peu connue lorsque le groupe exploratoire «BIM» de la SIA a tenu sa première séance le 27 octobre 2011. Sur la requête de celui-ci, la Commission centrale des normes (ZN) a par la suite approuvé l’élaboration d’un cahier technique et donc la création de la commission 2051, qui a entamé ses travaux en 2014. Au bout de trois ans, cette dernière a pu ouvrir son projet à la consultation. Les retours ont été nombreux: 60 personnes et organisations ont proposé un millier de commentaires et de suggestions de modifications textuelles, qui ont dû faire l’objet d’un vaste traitement. Ces échanges critiques ont en outre affermi la conviction que l’adoption d’une approche commune était essentielle, ce qui a abouti à une des qualités majeures du document.

Échange d’informations défini au niveau international

Or, déjà durant la période d’élaboration du cahier technique, les activités internationales autour de la conduite de projets via des maquettes numériques ont commencé à se structurer. 2016 a vu la création du comité technique européen CEN/TC 442 «Building Information Modelling (BIM)», auquel la SIA s’est d’emblée jointe pour participer à la normalisation. Les premiers contenus issus de ces travaux ont ainsi été incorporés dans le cahier technique.

Mais il est vite apparu que les nombreuses activités de normalisation lancées au niveau international auraient à terme une forte influence sur la normalisation suisse en matière d’échange d’informations sous une forme lisible par un ordinateur. C’est pourquoi un premier standard international a été repris dans la collection de normes suisses en 2017 avec les Classes de fondation d’industrie (IFC). Il s’agissait en l’occurrence d’un descriptif détaillé, donc d’un modèle pour l’échange automatisé d’informations dans les branches de la conception, de la construction et de l’immobilier. Dans ce domaine, d’autres normes ont suivi et de nouvelles s’y ajouteront encore pour optimiser la continuité du traitement de l’information entre machines. Au niveau de la mise en œuvre, ce sont avant tout les partenaires logiciels qui doivent reprendre les normes correspondantes dans leurs produits afin de concrétiser la plus-value de la normalisation, soit l’adoption d’un socle uniforme pour des applications efficaces.

Principes similaires – termes variables

Avec le recours à des informations en langage machine, les formes et genres de collaboration se modifient, car on ne répond plus seulement aux demandes d’information par des jeux de plans et des documents. Pour permettre un échange d’informations plus efficace, les intervenants doivent d’abord s’accorder sur celles dont ils ont réellement besoin. Cela serait d’ailleurs tout aussi judicieux dans l’emploi de versions papier, mais comme ce n’est alors pas indispensable, on ne s’en soucie souvent guère dans la pratique. La structuration indispensable du processus de projet et des demandes d’information a donc déjà été conceptualisée dans le cahier technique SIA 2051 indépendamment des avancées de la normalisation internationale. Les principes qui s’y appliquent sont majoritairement issus de la gestion de projets et de l’ingénierie des systèmes. Avec l’élaboration de la norme EN ISO 19650-1Organisation et numérisation des informations relatives aux bâtiments et ouvrages de génie civil, y compris modélisation des informations de la construction (BIM) – Gestion de l’information par la modélisation des informations de la construction – partie 1: Concepts et principes, un produit adéquat – qui décrit des concepts similaires – a été publié au niveau international.

L’utilité de lignes directrices

En soi, les normes visent la compréhension générale et représentent donc souvent des instruments abstraits, qui ne sont pas toujours applicables tels quels. De plus, une des particularités de la série de normes SN EN ISO 19650 est que son élaboration devance l’expérience que des années de pratique préalable auraient permis d’accumuler. Cela se traduit par un niveau d’abstraction encore plus élevé. C’est pourquoi la SIA, soucieuse de soutenir la branche dans l’application des normes, publie depuis longtemps des documentations et des lignes directrices, afin de faciliter l’accès aux bases normatives et de sécuriser leur mise en œuvre concrète. Le cahier technique SIA 2051 constitue ainsi un document axé sur la pratique, auquel le marché a largement adhéré. Quant aux normes internationales, elles définissent un socle normatif essentiel qui est appliqué en Suisse. Mais comme leur interprétation et leur mise en pratique s’avèrent généralement bien plus ardues que celles des normes nationales, les lignes directrices prévues jouent un double rôle: d’une part, les expériences acquises au cours des dernières années sont valorisées et, d’autre part, les concepts, termes et définitions figurant dans les normes internationales sont exemplifiés. Car une mise en œuvre probante de la série de normes SN EN ISO 19650 nécessite un mode d’emploi adapté aux spécificités nationales pour des projets d’une complexité variable.

Où en est le marché ?

L’application et donc la diffusion du cahier technique est notamment tributaire de la praticabilité et de l’applicabilité des bases normatives. Le remaniement envisagé des aides existantes vise donc au-delà d’une simple mise à jour des notions figurant dans les documents et modèles disponibles. On a aussi et surtout voulu mesurer l’utilité pratique attestée de la documentation proposée, dans le but de conserver et de reconduire ce qui a fonctionné et d’innover là où des lacunes existent.

L’enquête correspondante a été menée de décembre 2022 à fin janvier 2023 et ses résultats ont été diffusés dans les médias pertinents. En tout, 665 personnes – 464 en allemand et 201 en français – ont répondu aux questions. Analysés par la commission, ces retours ont pour l’essentiel livré les conclusions suivantes:

  • Le cahier technique et les documentations sont en partie perçus comme abstraits et théoriques. Comme la série de normes SN EN ISO 19650 est maintenant publiée en continu et renouvelée, les aides à l’application élaborées sur cette base peuvent désormais être rapprochées de la pratique, mieux adaptées aux spécificités nationales et plus concrètes.
  • La validité de lignes directrices est de dix ans. C’est pourquoi le document doit constituer une base valable plusieurs années et applicable à l’explicitation et à la désignation de la méthode BIM en Suisse, à laquelle des contenus analogiques et numériques de sources pertinentes peuvent être intégrés de manière flexible. Ces développements obéiront à un cycle de renouvellement plus rapide.
  • Les contradictions et ambiguïtés terminologiques entre normes, aides à l’application et documentations d’autres associations doivent être éliminées, sinon explicitées.
  • Les obstacles décrits par les participants à des projets BIM – tels la commande de prestations et de produits, leur rémunération, la mise en place d’une collaboration intégrale sur des projets ou l’assurance de la qualité pour la livraison d’informations – doivent être abordés.

Les nouvelles aides à l’application seront élaborées à partir de ces constats, en relation avec le développement parallèle au niveau européen de la Guidance on how to implement EN ISO 19650-1 and −2 in Europe, ainsi qu’en référence à l’avancement de la normalisation. Le calendrier actuel prévoit un achèvement des travaux d’ici au printemps 2024, avec une publication vers l’été de la même année. 

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