Na­tu­ra­li­ser l'­ar­chi­tec­tu­re

9e ArchiLab, laboratoire international d’architecture

Publikationsdatum
17-09-2013
Revision
25-08-2015

Certaines expositions captent mieux que d’autres l’esprit du temps. Il en fut ainsi pour Architectures non-standard au Centre Pompidou. En 2003, son commissaire annonçait sur un ton quasi apocalyptique rien de moins qu’une nouvelle ère pour l’architecture. Le progrès technologique était alors sur le point de créer de nouveaux liens entre l’écran du concepteur et l’unité de production industrielle. Ces procédés sont aujourd’hui largement acquis. La réalisation de Jakob + MacFarlane à Orléans en est un exemple parmi d’autres. 
Dix ans plus tard, en collaboration avec Marie-Ange Brayer, Frédéric Migayrou signe une session d’ArchiLab qui risque elle aussi de marquer son temps. Cette fois-ci, ce sont les croisements entre sciences, biologie moléculaire et mathématiques avancées, qui génèrent des nouveaux espaces d’investigation. L’architecture serait en train de basculer, comme elle a déjà pu le faire (baroque tardif, Art déco), dans une fascination pour la nature. 
Sauf que, contrairement aux précédentes « naturalisations », celle-ci ne serait plus qu’une affaire de représentation. Le vivant est sur le point de devenir une composante effective du bâti. Il est question de mousses végétales qui poussent sur les bétons et isolents, de nouveaux matériaux qui se développent par eux-mêmes et, plus généralement, d’une dimension organique qui irait bien au-delà de l’expérimentation formelle. L’idée qui traverse l’exposition serait celle d’une interaction entre le minéral et le vivant. Scénario cauchemardesque diront certains, mais qui n’en constitue pas moins une tendance tout à fait probable.
Au-delà des nouveaux modèles constructifs que la nature et les sciences pourraient offrir aux architectes, le perfectionnement des outils de calcul génère une catégorie d’applications qui tout en restant des artefacts, se comportent comme du vivant. C’est cette nouvelle espèce d’objets, de produits et de processus, qu’ArchiLab essaye de faire tenir ensemble.
Les reproches qui pourraient être fait à cette tendance sont nombreux : survalorisation de la technique, complexité procédurale, création d’un nouvel intermédiaire entre le bâtisseur et le commanditaire, attitude apolitique, sans parler de l’apparence des éléments exposés relevant plus d’un film de Cronenberg que d’un endroit où l’on aimerait voir grandir ses enfants. ArchiLab ne fait pas dans le consensus. Ce laboratoire prend ses distances avec la doxa du développement durable qui enrobe aujourd’hui tout et n’importe quoi. Elle expose les monstres, les anormaux, en prenant bien soin de souligner que ce qui les éloigne aujourd’hui de la norme pourrait se révéler déterminant pour la normalité à venir. Pour avoir choisi d’être radicale, cette session d’ArchiLab s’avère pertinente. Elle préfère surprendre, voire choquer pour bien signaler que quelque chose est en train de changer.

 

ARCHILAB 2013

Naturaliser l’architecture
FRAC Centre Orléans
Du 14 septembre au 2 février
www.frac-centre.fr

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