MAP 15

Ce catalogue édité par l’Association des étudiants de la section d’architecture de l’EPFL recense les 92 projets de master défendus en 2015. Il s’ouvre sur trois contributions de professeurs de l’école qui ont suivi certains des projets. Par une allégorie sportive, Nicola Braghieri s’interroge sur la mesure objective et le jugement impartial et plaide pour l’autocritique, la conscience et la réelle qualité. Bruno Marchand prolonge cette réflexion en abordant la question de la beauté en architecture. S’inscrivant dans l’héritage de l’artiste Agnès Martin, il avance timidement que «l’expression de la beauté de l’œuvre d’art ou d’architecture émane donc d’une forme d’exigence artistique et lyrique personnelle de l’artiste ou de l’architecte».
La dernière contribution d’Yves Pedrazzini révèle l’intérêt – sociologique – principal de ce catalogue. Comme il l’est mentionné en préambule de l’ouvrage, les étudiants sont libres de choisir leur projet de master. Cette liberté de choix est intéressante car elle offre aux lecteurs la possibilité de humer l’esprit du temps, de sonder les intérêts architecturaux de la jeune garde et des futurs professionnels. Le texte soutenu et engagé d’Yves Pedrazzini dévoile l’une des thématiques principales qui émergent de MAP 15: l’architecture pour les « clients damnés ». Le professeur au laboratoire de sociologie urbaine y voit peut-être les prémisses d’une résistance «à la fatalité des modes de production actuels» et, citant Pier Paolo Pasolini, «contre le fascisme ordinaire, spatial et social». La réaffectation des toilettes publiques lausannoises en logement pour les sans-abri, les stratégies de développement pour les bidonvilles du Chili, le camp de réfugiés en Jordanie ou encore la structures d’accueil pour les enfants soldats congolais sont autant de projets qui invitent l’enseignement de l’EPFL à se pencher plus catégoriquement sur «les damnés de la terre».
Deux autres catégories de projets dominent les rendus 2015. La reconstruction de l’Hejaz – l’ancienne ligne ferroviaire ottomane –, la prolongation du téléphérique du Salève à Genève ou la construction d’un aéroport en Sibérie ne sont que quelques exemples qui soulignent l’intérêt des étudiants pour les infrastructures d’une manière générale et la mobilité transnationale plus particulièrement. Enfin la réaffectation patrimoniale est une problématique traitée à plusieurs reprises. Si elle se pose généralement pour des infrastructures abandonnées et tombées en désuétudes – le stade olympique de Munich ou encore les Mercati Generali de Milan – un projet ose l’aborder de manière radicale pour un bâtiment encore jeune dans le temps long de l’architecture: la bibliothèque nationale de France.
Soulignons encore l’émergence d’un thème qui risque d’occuper une place importante ces prochaines années, celle de la réindustrialisation des villes.
Au final, même s’il ne laisse pas présumer de la qualité architecturale et technique des projets, cet inventaire à la Prévert permet aux lecteurs d’approcher le foisonnement créatif des étudiants de l’école d’architecture de l’EPFL. L’ouvrage se termine par deux beaux textes personnels signés par des diplomants, Marion Vuachet et Thomas Domenger.

MAP15. Master of Architecture Projects

Edité par l’Association des étudiants de la section d’architecture de l’EPFL, Lausanne.

Exposition «studiolo»
Les projets de master sont exposés jusqu’au 15 octobre aux Arches du Grand Pont à Lausanne.