L’in­di­ce Calat­rava

L’architecture à l’épreuve de la crise

Publikationsdatum
17-08-2012
Revision
19-08-2015

Qu’ont l’Espagne et la Grèce en commun ?
Outre le soleil, la mer et un taux de chômage supérieur à 20 %, chacun de ces deux pays a son lot d’ouvrages du célèbre architecte Santiago Calatrava. Simple coïncidence ou symptôme commun d’une même pathologie, Valence et Athènes contemplent avec le même désespoir leurs exubérances bâties. Dans les deux cas, le pari d’un investissement qui allait déclencher un bond en avant aura été perdu. 
A Athènes, la plus-value des Jeux de 2004 se fait encore attendre. Plus personne n’y croit. Même désillusion à Valence, où le fol espoir de l’effet Guggenheim (créer un buzz architectural pour relancer une région) s’est heurté à l’inéluctable réalité de la récession. 
L’aggravation de la crise pousse même certains à en imputer la responsabilité aux architectes. Santiago Calatrava serait accusé d’avoir tiré profit de contrats abusifs qui liaient sa rémunération au coût final du projet. Plus le budget était dépassé, plus son cachet augmentait. Pas vraiment de quoi inciter à respecter les délais.
Même son de cloche à Athènes, où les Grecs découvrent avec écœurement l’ampleur de la manipulation dont ils ont fait l’objet pendant la préparation des Jeux de 2004. Certains projets auraient été retardés sciemment, pour pouvoir être mis en œuvre sans le moindre contrôle, en procédure d’urgence. Tout le monde se souvient du toit du stade qui n’était pas encore prêt quelques jours avant l’inauguration des Jeux. Moins nombreux sont ceux qui ont retenu la vingtaine d’ouvriers morts sur les chantiers olympiques, astreints à des cadences infernales pour respecter les délais. Les Jeux ont un coût et celui-ci n’est pas seulement financier. 
En Espagne, où l’on ne compte plus les nouveaux aéroports jamais utilisés et les projets pharaoniques inachevés, Valence n’est pas une exception. La Cité de la culture d’Eisenman en Galice, grandiose et inachevée, est devenue le symbole non pas du projet qui dynamise une région, mais plutôt qui dynamite ses finances. 
Calatrava, comme Eisenman, n’y est probablement pour rien. Ils ont fait ce qu’on attendait d’eux : des gesticulations témoignant d’un certain esprit de grandeur ; des symboles plus ou moins réussis du progrès et du développement. Chaque région a voulu reproduire le scénario « Bilbao », chaque ville se devait d’avoir son star architecte. 
A l’heure des bilans, les moins entreprenants se révèlent les plus épargnés. Quant à l’architecture de star, si elle a fait le bonheur de certains pendant les années de prospérité, la voici transformée en indice d’une crise dont on ne voit plus la fin. 

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