«Landing» – des jard­ins pro­to­ty­pes pour Lau­sanne Jard­ins 2014

Résultats de concours

Le résultat du concours international a lancé publiquement la manifestation lausannoise devenue, au fil de ses cinq éditions, un incontournable dans le domaine du paysagisme européen

Publikationsdatum
30-04-2013
Revision
23-10-2015
Cedric van der Poel
Codirecteur d'espazium.ch, espace numérique des éditions pour la culture du bâti

Le 15 avril, les autorités cantonales et municipales ont inauguré devant 300 personnes l’exposition du résultat du concours international Lausanne Jardins 2014. Le public a ainsi pu découvrir 133 projets exposés dans une scénographie simple et efficace, qui révèle tout le potentiel muséographique des anciennes halles CFF, prochainement détruites pour faire place au nouveau pôle muséal cantonal.
Les participants au concours devaient répondre à un cahier des charges précis, basé sur un concept imaginé par les deux nouveaux commissaires de la manifestation – Christophe Ponceau, architecte paysagiste français et Adrien Rovero, designer industriel lausannois.
« Naturellement nous avons cherché un concept qui puisse rassembler nos deux professions, et donc privilégié une approche pluridisciplinaire. Notre souhait est également de recentrer la manifestation au cœur de Lausanne », a indiqué Christophe Ponceau. Les commissaires ont amené les concurrents à réfléchir non seulement au contexte et au végétal, mais aussi au contenant, à la façon d’acheminer ou de déplacer le jardin, à son entretien. « Nous avons voulu poser la question de l’installation du végétal en milieu urbanisé. Les projets ne sont pas aménagés dans des espaces ouverts et vierges comme cela peut être le cas dans un festival de jardins comme celui de Chaumont-sur-Loire. A Lausanne Jardins, les questions de l’usager et du contexte sont donc primordiales », a précisé Adrien Rovero.
Mais, comme pour rappeler que l’on ne maîtrise pas complètement la nature, le parcours et l’emplacement des sites ont été déterminés par un lâcher de graines sur un plan agrandi du centre de Lausanne. De ce concept est tiré le titre de la manifestation : « Landing ». 25 pistes d’atterrissage seront disséminées dans la capitale vaudoise, de la gare à la cathédrale. Des jardins imaginés par des architectes-paysagistes, architectes, designers, artistes, performeurs provenant de Suisse, d’Europe et des Etats-Unis viendront s’y poser le temps de l’été 2014. 
Même s’il possède son lot de réponses hors sujet, banales ou déjà vues (de grâce brûlons toutes les palettes !), le millésime 2014 est prometteur. Les commissaires ont réussi, tant par le choix de la thématique que par celui de la composition du jury1, à marquer de leur empreinte le résultat du concours. Sur les 133 projets reçus, le jury en a retenu 26. Ils répondent tous plus ou moins bien aux objectifs des deux commissaires : stimuler le développement de jardins prototypes tout en proposant aux visiteurs une manifestation festive. 

Trois prix emblématiques

Les trois projets primés par le jury2 répondent de manière différenciée (esthétique, contextuelle ou efficace) à ces objectifs et intègrent les deux sensibilités insufflées dans le concours : l’art du jardin et le design. 
Landing n°4, proposé par le bureau suédois Johannes Norlander Arkitektur AB, est un projet très esthétique et dont la logique constructive ingénieuse et simple lui permet d’être facilement déplacé. Composé d’une montagne enrobée d’une végétation alpine et posée sur une fine plaque en aluminium reposant sur des piliers très étroits, Landing n°4 fonctionne par contrastes. La structure inférieure, très légère, fragilise le massif montagneux pourtant relativement imposant. Et, comme pour s’amuser des clichés helvétiques, les architectes suédois sont venus semer de la végétation alpine au cœur d’une des régions les plus fortement urbanisées de Suisse, soulignant ainsi une des tensions principales du paysage helvétique. 
Avec Outbreak, le bureau d’architecture lausannois Frueuhauf Henry & Viladoms présente un projet plus contextualisé et à l’aspect visuel très fort. Constitué de huit modules métalliques bombés et plantés de gazon répartis entre « chaque pilier du portique, dans l’interstice de la petite fenêtre du socle ou encore dans le bassin de la fontaine », ce projet donne l’impression d’un bâtiment colonisé de l’intérieur par le végétal, renforçant ainsi l’aspect ornemental de la façade. 
Bien que maintes fois vues et revues tant au niveau de l’idée que du geste « manifeste », les Places de parcs végétalisées de l’équipe formée par l’agence Fulguro, du photographe et paysagiste Yann Mingard et de l’architecte Catherine Cotting se distinguent par leur adéquation à la thématique. En effet, cinq échantillons de parcs suisses viendront squatter des places de parcs de l’avenue Vinet, invitant ainsi d’autres villes à Lausanne Jardins 2014. La structure conçue pour accueillir ces échantillons, le « mobilflore », est simple, mobile et adaptable aux différents contextes, s’inscrivant ainsi dans l’idée de prototype promue par les deux commissaires de la manifestation. 

Du projet à la réalisation

Le résultat du concours n’est que la première étape d’un processus qui va s’étendre jusqu’en 2014. D’ici à juillet, les équipes primées devront rendre leur projet définitif en intégrant les remarques du jury et du bureau technique en charge d’étudier la faisabilité technique et financière des jardins. Ces derniers entreront ensuite dans une phase concrète de réalisation, dirigée par le Service des parcs et domaine de la Ville de Lausanne, sans qui aucune des éditions de Lausanne Jardins n’aurait pu voir le jour. L’inauguration est prévue en juin 2014. 

Distinction

Botanic Box 
Jouant la carte de la thématique de la mobilité, les auteurs développent un container dont le jardin peut être réalisé à un endroit, transporté facilement et exposé ailleurs. Posé sur l’îlot Monnard surplombant l’avenue de la Gare, son impact visuel renforcera la présence de la manifestation sur l’un des grands axes circulatoires de Lausanne.

Aucupare
En proposant une pépinière urbaine – 112 baliveaux de sorbiers des oiseleurs sur l’esplanade entre le Petit-Chêne et la rue de Mornex, les concepteurs questionnent la provenance, le stockage et la vie des végétaux avant qu’ils ne « fassent jardin ».

Salix Colonia 
Des paniers vivants formés par et plantés de saules sont déposés le long des escaliers du Grand-Pont. La grande variété des saules donnera à ce site des ambiances très différentes tout au long de la manifestation.

Mobilisation végétale 
1000 sacs de jute remplis de substrat pré-ensemencé de graines et de bulbes entreposés dans les escaliers du Grand-Pont offrent aux habitants de Lausanne les munitions pour mener une lutte civique végétale.

Rolling Garden
Avec Rolling Garden, les auteurs proposent d’envahir aléatoirement les escaliers du Grand-Pont par des tubes en plastique. Rempli de matière semée de différentes graines, ce jardin veut insuffler un peu de désordre fleuri dans la ville.

Rideaux 
Les créateurs proposent de fermer un îlot situé en contrebas de Montbenon par plusieurs rideaux végétaux monumentaux. Formée de différentes plantes, l’installation change d’aspect au gré des mouvements.

L’île verte
Par quelques touches subtiles – installation de tubes peints en différents verts et plantations d’anis, de menthe, de sauge et autres végétaux –, ce jardin veut raviver les couleurs du terrain de la Vigie, exacerber son caractère et le rendre accessible au public, sans pour autant en perturber l’utilisation actuelle.

On stage
La proposition théâtralise la fontaine de la rue Neuve par une intervention en deux plans. Des colonnes de lierre à petites feuilles offrent un fond redondant à la Vénus de la fontaine, vêtue d’une robe magistrale de bégonias et de bacopes.

Vue souterraine
L’installation se compose de 616 cageots empilés remplis de compost. Pendant les quatre mois d’exposition, les passants pourront observer la lente transformation des déchets ménagers. Elle questionne également la non-affectation de ce lieu surplombant la place de la Riponne.

Jardiniers invisibles 
Trois « vermicomposteurs » déposés au milieu d’une prairie fleurie mettent en lumière le rôle écologique des vers de terre.

Mention

City Crown 
Les auteurs développent une serre architecturale sur le toit Bessières. Elle peut fournir un nouvel espace de productivité agricole pour la ville et offrir une alternative formelle à la monotonie de ses toits.

Contextes
Des kits préfabriqués de végétation sauvage viennent marquer, relever, souligner et rappeler divers contextes historiques de la place Pépinet, offrant aux usagers un « mémorable » lieu de convivialité.

Plant Lines 
Reprenant le principe de la corde à linge tendue entre deux façades, ce projet veut créer un lien social entre voisins du passage Mercier. Le principe de corde et le système d’accrochage des pots permettent à l’installation de devenir une plateforme d’échange entre vis-à-vis.

Nestor, le jardin loupe
Création d’une ambiance favorisant l’accueil d’oiseaux dans ce passage en sous-bois situé entre Montbenon et le quartier du Flon.

UFO
Cette soucoupe volante fleurie qui a atterri sur la promenade Schnetzler, proche d’un carrefour, ambitionne de questionner les automobilistes sur leur propre mobilité. Une installation multimédia et sonore vient compléter l’installation.

Par monts et par vaux
Les auteurs veulent questionner le côté minéral du végétal, en déposant des montagnes de marbre et de lichen dans et autour de la fontaine de la rue Neuve. Ce paysage alpin rappelle ceux qui se dressent autour du lac Léman.

Garden Collective
Issu d’un processus collectif mobilisant pour son installation des étudiants et des volontaires, cette proposition consiste en une multitude de sacs en textile dans lesquels sont semés différentes plantes. Ils seront déposés sur les escaliers et l’esplanade de l’église du Valentin, offrant aux visiteurs divers chemins de déambulation.

nPOD
Des compositions végétales enfermées dans de petites bulles de verre posées dans le parc de l’Hermitage soulignent l’artificialité et la mise en scène de la nature en ville.

Dessous d’un bois
En amplifiant par une scénographie l’aspect forestier au pied du séquoia de la place du Nord, les paysagistes veulent renforcer la présence impromptue de cet arbre en milieu urbain.

Mention réalisation conditionnelle 
Infragarden 
Création d’une bouche d’égoût dans laquelle est créée une végétation de grotte créant un paysage par un jeu de miroirs.

Tag You’re It
Basé sur le principe de la guérilla végétale, ce jardin propose différentes bombes végétales et divers moyens de dissémination.

Mention sans réalisation

Parkingson
Formé de plusieurs troncs de bois de diamètre variable et recouverts de pelouse, ce jardin pose la question de la place dédiée au stationnement en ville sur un espace comme celui de la place du Tunnel.

Adore me wild 
Par une série de containers empilés et semés de végétation sauvage, cette équipe importe un questionnement très présent en Amérique du Nord. Celui, induit par les crises économiques successives, du retour de la nature sauvage en milieu urbain.

 

Notes

1 Réuni en mars dernier, le jury était composé de : Florence Germond, Présidente du jury, Conseillère Municipale, Lausanne, (CH) / Natacha Litzistorf, Présidente de l’Association Jardin urbain, (CH) / Lorette Coen, Historienne du paysage, journaliste et essayiste (CH) / Nicole Christe, Cheffe du Service d’architecture de la ville de Lausanne (CH) / Chantal Prod’hom, Historienne de l’art, Directrice du Mudac, Lausanne (CH) / Alexis Georgacopoulos, Designer, directeur de l’ECAL, Lausanne (CH) / Adrien Rovero, Designer, Commissaire de Lausanne Jardins 2014 (CH)/ Christophe Ponceau, Scénographe /paysagiste, Commissaire Lausanne Jardins 2014 (F) / Yves Lachavanne, Architecte paysagiste SPADOM (CH) / Etienne Balestra, Chef division entretien SPADOM (CH) / Chris Kabel, Designer (NL) / Henri Bava, Agence TER Paysagistes – urbaniste (F & D) / Robert Ireland, Artiste (CH)
2 Des 26 projets retenus, 3 ont reçu un prix, 10 une distinction et 13 une mention dont une avec réalisation conditionnelle et deux sans réalisation

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