Cont­rat de tra­vail in­di­vi­du­el SIA: La dif­fé­rence mi­ni­me, mais dé­cisi­ve, ent­re heu­res sup­p­lé­men­tai­res et heu­res ex­cé­dant la du­rée lé­ga­le ma­xi­ma­le du tra­vail

Pour l’établissement d’un contrat de travail individuel, la question des heures supplémentaires, respectivement celle des heures excédant la durée légale maximale du travail, font souvent débat. Voici donc un rappel des différences et des principes à observer dans ce contexte.

Publikationsdatum
15-11-2017
Revision
07-12-2017

Le chiffre 11 du contrat de travail individuel SIA révisé formule des propositions pour la compensation des heures supplémentaires, ainsi que des heures excédant la durée légale maximale du travail. Or, des lecteurs attentifs se souviendront de ma contribution dans Tracés (nos 9, 11, 13-14/2014) où j’expliquais que, moyennant un accord écrit, tant la compensation d’heures supplémentaires par des congés que leur rétribution assortie de la majoration légale de 25 % peuvent être exclues. Le contrat de travail individuel SIA ne prévoit toutefois pas de disposition de ce type. Rappelons cependant que ce dernier a été conçu comme un canevas pour l’établissement de contrats de travail et que des dispositions autres que celles qui y sont proposées sont en partie envisageables. Comme le précise en effet l’introduction aux « Explications » publiées à ce sujet, le formulaire de contrat SIA 1031 n’est qu’un simple modèle, soit une sorte de « chablon » destiné à rationaliser et à simplifier la conclusion d’un contrat.

Le point crucial : heures supplémentaires versus heures excédant la durée légale maximale du travail


Les heures supplémentaires, tout comme les heures excédant la durée légale maximale du travail, peuvent être classées comme du « temps de travail additionnel ». Elles ont en commun de devoir être fournies en urgence. De plus, ces « heures additionnelles » doivent pouvoir être raisonnablement exigées de l’employé. Serait par exemple irrecevable, respectivement inadmissible, une demande de l’employeur pour la fourniture quotidienne, pendant quatre à six semaines, de deux heures excédant la durée légale maximale du travail. Il en va de même si un empêchement temporel de l’employé est connu de longue date (fréquentation régulière d’un cours du soir, p. ex.). Et selon l’art. 36 al. 2 de la loi sur le travail (LTr), les travailleurs ayant des responsabilités familiales ne peuvent être astreints à des durées de travail supplémentaires qu’avec leur consentement.

Les heures supplémentaires sont des heures additionnelles par rapport à la durée du travail convenue par contrat ou déterminée dans un contrat-type de travail ou une convention collective (art. 321c al. 1 CO). La LTr, par contre, s’applique aux heures supplémentaires représentant un dépassement de la durée maximale du travail. A noter que les heures excédant la durée légale maximale du travail sont donc aussi des heures supplémentaires, puisqu’elles dépassent nécessairement la durée de travail contractuellement fixée. L’importance de la distinction entre heures supplémentaires et heures excédant la durée légale maximale du travail réside dans la question de leur compensation, respectivement de leur indemnisation : tant que les heures supplémentaires ne représentent pas aussi des heures excédant la durée légale maximale du travail, les prescriptions légales applicables à leur compensation, respectivement leur indemnisation, peuvent être modifiées par les parties au contrat en défaveur de l’employé. Mais, dès lors qu’elles entrent dans la catégorie des heures excédant la durée légale maximale du travail, les dispositions y relatives de la LTr sont de nature impérative.

Quelle durée de travail s’applique à qui ?


Selon l’art. 9 LTr, la durée maximale de la semaine de travail est de 45 heures pour les travailleurs occupés dans les entreprises industrielles ainsi que pour le personnel de bureau, le personnel technique et les autres employés, y compris le personnel de vente des grandes entreprises du commerce de détail. Pour les travailleurs hors industrie (professions artisanales/manuelles), elle est de 50 heures. Pour les architectes, la durée maximale de la semaine de travail fixée par la loi s’élève donc à 45 heures. Ainsi, lorsqu’une employée architecte, contractuellement engagée à raison de 42 heures par semaine, travaille (par nécessité) durant 47 heures au cours d’une semaine, elle fournit trois heures supplémentaires et deux heures additionnelles.

Compensation ou indemnisation d’heures supplémentaires


Selon le code des obligations (art. 321c al. 2 CO), l’employeur peut, avec l’accord du travailleur, compenser les heures de travail supplémentaires par un congé d’une durée égale – au cours d’une période appropriée. Si les heures supplémentaires ne sont pas compensées par un congé et qu’il n’en a pas été disposé autrement dans un accord écrit, un contrat-type de travail ou une convention collective, l’employeur doit rétribuer les heures supplémentaires, en versant le salaire normal majoré d’un quart au moins (art. 321c al. 3 CO). Ces prescriptions constituent des normes dites dispositives, en ce sens qu’elles s’appliquent en l’absence d’autres dispositions contractuelles écrites. Par accord écrit, les parties au contrat peuvent ainsi, soit exclure toute rétribution complémentaire pour des heures supplémentaires, ou seulement la majoration de 25 %. S’il a été convenu – par écrit – que les heures supplémentaires sont comprises dans le salaire, cela veut dire que leur compensation par un congé est exclue. A plus forte raison, cela permet aussi de passer outre l’obligation d’obtenir le consentement de l’employé pour la compensation des heures supplémentaires dans le contrat de travail écrit. Le contrat de travail individuel de la SIA (modèle de contrat) ne propose quant à lui que le choix entre la compensation des heures supplémentaires par un congé sans le consentement de l’employé et leur indemnisation sans majoration. Mais cela ne s’applique encore qu’au cas où les heures supplémentaires sont urgemment requises et admissibles pour l’employé. Dans certains contrats de travail, on trouve aussi parfois une clause selon laquelle des heures supplémentaires ne peuvent être fournies que sur demande expresse. Or, selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, des heures supplémentaires non exigées mais tacitement acceptées par l’employé doivent être assimilées à celles expressément requises. En conséquence, elles doivent donc être compensées ou indemnisées, pour autant que la compensation, respectivement l’indemnisation des heures supplémentaires n’aient pas été exclues.

Compensation ou indemnisation d’heures excédant la durée légale maximale du travail


Contrairement aux dispositions sur les heures supplémentaires relevant du CO, l’indemnisation, respectivement la compensation des heures excédant la durée légale maximale du travail sont impératives, car régies par la loi sur le travail. Cette loi prescrit que l’employeur doit verser à l’employé une majoration de salaire d’au moins 25 %. Pour les catégories de travailleurs dont la durée maximale du travail est de 45 heures, cela ne s’applique toutefois qu’au travail supplémentaire excédant 60 heures au cours de l’année civile (art. 13 al. 1 LTr). En d’autres termes, les 60 premières heures additionnelles sont en l’occurrence assimilées à des heures supplémentaires. S’il a donc été convenu par écrit dans le contrat de travail que les heures supplémentaires ne seraient par indemnisées, non seulement la majoration, mais aussi le salaire de base ne seront pas dus pour ces 60 heures de travail supplémentaire. Si, au contraire, l’indemnisation légale des heures supplémentaires n’a pas été exclue du contrat, le travailleur a droit au salaire de base majoré de 25 % également pour les 60 premières heures additionnelles. Dès la 61e heure, en revanche, chaque heure excédant la durée légale maximale du travail doit impérativement être compensée par un congé de même durée ou indemnisée selon le salaire de base majoré de 25 % (et ce, même s’il en avait été convenu autrement dans le contrat de travail).

A suivre


Devant les tribunaux, les litiges portant sur les heures supplémentaires / les heures excédant la durée légale maximale du travail sont fréquents. Dans de telles procédures, le contrôle du temps de travail que la loi impose à l’employeur joue souvent un rôle crucial. Nous reviendrons donc sur cette problématique et sur ses implications dans un prochain article.

Magazine