Con­strui­re en mon­tagne

Editorial du 23-24/2015

Publikationsdatum
03-12-2015
Revision
03-12-2015

Avant l’avènement du romantisme et la naissance du tourisme alpin, les alpages étaient des espaces de subsistance aux maigres ressources. Quant à la haute montagne, hormis pour quelques cristalliers, chasseurs et contrebandiers, elle était perçue comme un non-lieu stérile, dénuée d’intérêt, entourée de craintes et de superstitions. On y construisait pour l’essentiel des abris, en utilisant les ressources locales et en s’adaptant aux contraintes environnementales. Les véritables chantiers de haute montagne apparaissent à la fin du 19e siècle et surtout au 20e avec le développement d’une infrastructure des superlatifs liée au tourisme.
Lorsque débarquèrent les premiers voyageurs en quête d’aventures alpines, il fallut les loger. Fleurirent alors les hôtels d’altitude. Conçus non plus pour abriter mais pour accueillir, ces bâtiments on représenté une rupture avec la tradition en s’implantant dans des sites exceptionnels mais difficiles d’accès. Le leitmotiv de ces établissements était d’offrir le confort de la ville au plus près des cimes austères et enneigées. Bien que certains soient tombés en désuétude, les survivants sont pratiquement tous des témoins architecturaux classés et valorisés. Les différents niveaux de contraste (nature/culture, ancien/moderne, intérieur/extérieur) qui les traversent en font des lieux hors du commun, offrant au cinéma et à la littérature des huis-clos à la fois fermés sur eux mêmes et ouverts sur ce qui les entoure.
Puis, au gré des évolutions sociales, le tourisme a effectué sa mue industrielle. Bien souvent, l’esprit des villes, avec son lot de vacanciers-consommateurs, a conquis les versants enneigés, sans vue d’ensemble et sans réelle planification : des petites villes saisonnières aux stations hors-sol construites de toutes pièces. Les exemples d’un développement raisonné qui afficherait une véritable stratégie globale sont plus de l’ordre de l’exception que de la règle.
Dans cette dernière édition de 2015, TRACÉS présente trois constructions de montagne qui pourraient faire partie de ces exceptions. Qu’il s’agisse de la transformation de granges agricoles en complexe hôtelier, de la construction d’un hôtel ou d’un refuge de haute montagne, nous avons là des projets qui ont en commun de refuser le modèle du chalet et de respecter le substrat matériel et culturel sur lequel ils sont bâtis.

 

 

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