Col­lo­que con­jon­c­tu­rel SIA: Les spé­cia­lis­tes en re­cher­che con­jon­c­tu­rel­le à la ren­cont­re des con­cep­teurs

Un colloque a réuni des bureaux membres de la SIA et le réputé économiste de l’EPFZ Jan-Egbert Sturm. Ce fut l’occasion de débattre des liens entre économie globale et perspectives conjoncturelles de la branche suisse des études pour la construction.

Publikationsdatum
01-12-2016
Revision
01-12-2016

Dans le cadre d’un colloque organisé par la SIA le 25 octobre, un petit groupe de bureaux membres a rencontré des spécialistes de l’EPFZ en recherche conjoncturelle. La discussion était animée par Jan-Egbert Sturm, l’expert néerlandais qui dirige depuis 2005 le Centre de recherches conjoncturelles (KOF) de l’EPFZ, et qui est actuellement considéré comme l’un des économistes les plus influents dans l’espace germanophone. Il était accompagné de ses collègues Klaus Abberger, responsable de la division Enquêtes conjoncturelles, et Anne Kathrin Funk, experte du KOF pour la construction.
Parmi les participants, l’architecte Rudolf Trachsel a formulé sa vision des prévisions conjoncturelles comme suit: «En ce qui me concerne, la recherche conjoncturelle s’apparente à un coup d’œil dans une boule de cristal. Et l’on s’interroge sur les facteurs et les variables réellement susceptibles de livrer des pronostics fiables.»
Or, le principal objectif du colloque était justement d’expliciter les méthodes appliquées en recherche conjoncturelle et de permettre un contact direct entre les architectes et les ingénieurs représentant des bureaux de référence et des analystes clés du marché de la construction et de sa branche des études. Il s’agissait en l’occurrence de montrer comment, à partir de variables soigneusement définies, on extrapole une vision d’ensemble et des projections pour un secteur économique donné.
La rencontre a ainsi mis en relation des personnes qui se trouvent aux deux pôles de la récolte de données trimestrielle du KOF, soit les spécialistes qui traitent ces données et les propriétaires de bureaux, dont la participation active aux enquêtes confère leur pertinence aux résultats. Rudolf Trachsel y participe régulièrement car, dit-il, «nous souhaitons, d’une part, connaître notre position par rapport à la concurrence et, d’autre part, nous estimons que, comme bureau membre de la SIA, il est de notre devoir de collaborer aux enquêtes afin de contribuer à la vue d’ensemble sur notre branche».

Des visages derrière les chiffres-clés

Ainsi, non seulement les concepteurs ont-ils pu interroger directement les spécialistes de l’économie et obtenir des explications détaillées concernant les tendances dans la branche des études pour la construction, mais l’équipe du KOF a, elle aussi, profité de découvrir des visages, des réflexions et des expériences personnelles relevant de la branche et d’approcher les entreprises à l’origine des chiffres qu’elle agrège au quotidien.

Sturm a éclairé pour ses hôtes le fonctionnement de la « boule de cristal » qu’est la recherche conjoncturelle et montré comment les projections pour la branche des études et de la construction sont établies selon une approche «top-down»: l’observation porte d’abord sur la situation générale, en établissant pour divers pays qui ont une forte influence sur la Suisse des pronostics relatifs à l’évolution des taux, du cours des monnaies, des prix et du PIB, afin de jauger le dynamisme du commerce mondial. A partir de cette appréciation, on évalue la « météo générale » qui en résulte pour l’économie suisse ouverte et tournée vers le marché international, en tenant compte de ses politiques monétaires, fiscales et salariales. Avec l’aide des experts de la branche et d’une multitude de modèles, la vue d’ensemble pour le secteur considéré est alors mise à jour.

Pronostic versus simulation

Les estimations se basent toujours sur les évolutions les plus probables en l’absence d’aléas externes. Lorsqu’une disruption exogène (comme le Brexit, p. ex.) se produit, on corrige le modèle après coup. Ainsi, même si la branche des études aspire à réfléchir sur le long terme, Jan-Egbert Sturm insiste sur le fait que des prévisions au-delà de 2018 ne relèvent plus du pronostic, mais plutôt de la simulation, soit d’une projection purement théorique. C’est pourquoi le KOF se montre très prudent sur de telles prévisions.
La conjoncture internationale traverse actuellement une période de convalescence, si bien qu’en comparaison européenne l’évolution du PIB suisse se démarque. Pour le marché de la construction autochtone, la situation reste bonne – avant tout en raison des taux bas et de l’absence d’inflation qui découlent à leur tour du bas prix du pétrole. Déjà forte actuellement, la construction de logements continuera à augmenter. De même, les investissements dans le génie civil et l’infrastructure ferroviaire suivent une courbe ascendante.
Les participants au colloque confirment les indicateurs avancés, comme l’a corroboré l’architecte Trachsel : « Les pronostics recoupent fondamentalement ce que je constate au quotidien. Cet automne, les appels d’offres publics dans les domaines du génie civil, des routes et des infrastructures ont augmenté. La situation s’est également détendue en ce qui concerne la pénurie de collaborateurs spécialisés. On trouve à nouveau davantage d’architectes correspondant au profil que nous recherchons. » Cela étant, les architectes sont moins fortement touchés par la conjoncture que par les offres mises au concours. 
Réagissant à son tour aux explications de Sturm, le technicien en bâtiment Marco Waldhauser de Münchenstein s’est dit « surpris et fasciné par le nombre et la diversité des facteurs durs et mous qui entrent dans la composition des modèles ».

Le Tessin, source de préoccupation

Ingénieure et conseillère municipale en charge du service des bâtiments de Lugano, Cristina Zanini Barzaghi a exprimé ses doutes sur la validité des pronostics du KOF pour toutes les régions suisses. La réalité tessinoise lui paraît nettement moins rose, principalement en raison du voisinage immédiat de l’Italie. La chaîne de création de valeur, évoquée par Sturm pour expliquer la sous-enchère salariale, exerce une pression sur les prix, si bien que les concepteurs offrent leurs prestations à des prix très bas. Et d’ajouter que cette pression touche également les pouvoirs publics, dont les rentrées fiscales s’amenuisent aussi en raison de l’inflation négative, et qui doivent donc réduire leurs dépenses en conséquence.
Et que font les bureaux des pronostics émis ? Marco Waldhauser s’en sert comme d’une boussole: «Je consulte les résultats de l’enquête du KOF pour la SIA et je les confronte à mes impressions et aux tendances observables dans mon entreprise. Cela permet de dresser un état des lieux actuel, mais n’autorise toutefois pas de projection à plus long terme. »
Les participants sont parvenus à la conclusion qu’il serait très utile d’affiner encore davantage le détail de l’analyse consacrée à la branche des études pour la construction.

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